Au programme : réunions d’actionnaires agitées, écolos en colère, criminels climatiques rusés, grévistes découragés, syndicats avares et virage parfait. Votre Filet Pur. Même dans les moments difficiles.
Grippe-sou
Il y a eu de l’ambiance mercredi dernier à Zaandam. Les écologistes ont fait grand bruit, les syndicalistes ont traité Frans Muller de grippe-sou. Ils voulaient en appeler au sens de l’éthique des actionnaires : « Peut-être trouvent-ils aussi cela moralement répréhensible. » Ah bon ? C’est mignon. Comme si ces investisseurs ne se préoccupaient pas avant tout du cours de l’action (à des niveaux records, contrairement à celui de Colruyt et Carrefour) et de leurs dividendes. À la caisse ! Et comme si les bannières en français allaient impressionner les Hollandais et les Américains.
Non, ces actionnaires sont très satisfaits de la politique claire d’Ahold Delhaize. Avec Muller, vous savez exactement à quoi vous en tenir en tant qu’investisseur. Avec Frans, ça file droit. Vision claire, regard tourné vers l’horizon, pas de virage, pas d’improvisation. Une stabilité tranquille. Et ce alors que c’est presque tout le monde de la distribution qui s’érode de toutes parts dans la panique. Faut le faire.
Corporate blabla
Pas de place non plus à l’improvisation lors de cette assemblée des actionnaires. Elle a commencé par un flot ininterrompu et ennuyeux de ‘corporate blabla’ déjà publié depuis longtemps dans le rapport annuel. Un rituel, rien de plus. Mais la suite ! Une succession interminable d’interventions d’activistes climatiques qui se croyaient plus intéressants que Frans Muller, Nathalie Knight et Wouter Kolk réunis. Au grand dam des « vrais » actionnaires qui n’étaient là que pour l’essentiel : les sous.
Les interventions étaient chargées en émotion, donnant l’impression que le détaillant est à lui seul à l’origine de la fin du monde. C’est trop d’honneur : Ahold Delhaize fait de son mieux, mais peut compter sur le soutien d’une infinité de complices des émissions et de criminels environnementaux et climatiques qui s’efforcent tout autant, voire plus, de réduire la planète à néant. Pas le moins du monde les millions de clients, bien entendu. À coups de questions sournoises, ces écolos espéraient surtout amener le dirigeant à faire des déclarations susceptibles d’aboutir à un procès, comme ils l’avaient déjà fait avec Shell. Wishful thinking.
32 euros
En revanche, pas le moindre mot sur Delhaize, qui représente à peine 6 % du chiffre d’affaires du groupe. Aucun actionnaire ne s’inquiète de cet appendice négligeable au sud du Moerdijk. Si les syndicats avaient pris la peine d’acheter une action dérisoire d’Ahold Delhaize, ils auraient pu poser une question eux-mêmes, comme ces défenseurs de l’environnement. Et encaisser. Quod non. Le trésor de guerre est-il déjà épuisé ? 32 euros, était-ce vraiment déjà trop ? Aïe !
Entre-temps, le nombre de magasins Delhaize fermés diminue de jour en jour. Ils ne sont plus que 21 à faire front. Parce qu’ils sont intimidés ? Ou fatigués par la grève ? Ou conscients que Delhaize ne reviendra pas sur son intention de franchiser tous ses magasins ? Et qu’ils feraient mieux de s’en prendre à notre gouvernement impuissant plutôt qu’à un détaillant qui tente de sauver sa peau ? Delhaize n’est rien d’autre que le canari dans une mine de charbon. Ce qui, soit dit en passant, est une très mauvaise nouvelle pour notre fier leader du marché.
Virage
Une annonce émouvante dans le journal : « Merci pour votre compréhension et votre patience. » Quelle compréhension et quelle patience, Delhaize ? Parce ce que j’ai dû acheter mes mangues chez Colruyt peut-être, où elles attendent dans le froid ? Et il n’y a même pas de chips de pois chiches !
Enfin… Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, à ce qu’il paraît. Chez Louis Delhaize, ce ne sont pas des imbéciles, et ils n’hésitent pas à prendre une meilleure direction. Un nouveau directeur général a repris les rênes le mois dernier, et il ne reste manifestement pas les bras croisés. Les mécréants qui ont eu la funeste idée de rebaptiser tous les supermarchés sous l’enseigne Louis Delhaize ont donc été rappelés à l’ordre. Ceux qui ne sont pas déjà partis, du moins.
Parce que quel était le problème avec Match, finalement ? Presque tout, en fait, à l’exception peut-être du nom. Voilà qui est rectifié. Plus que le reste, donc. Bref, tout ira bien. Ou pas. Qui le dira ? À la semaine prochaine !