Qui peut tirer profit du conflit social chez un concurrent ? La Belgique est-elle le Bakhmout de la distribution alimentaire européenne ? Depuis quand les choux de Bruxelles viennent-ils du Maroc ? Et pourquoi les marques sapent-elles leurs propres fondements ? Filet Pur mène l’enquête !
Fake franchise
Les intéressés par la reprise d’une des filiales déficitaires de Delhaize ne sont pas au bout de leurs peines : des candidats à la reprise se sont déjà présentés pour chaque magasin, et même plus d’un pour la plupart des magasins, sous la devise « pas de tracas, tout le monde riche ». Ces entrepreneurs dynamiques devront toutefois faire preuve d’un peu de patience : un médiateur social doit d’abord se mettre à l’œuvre. Son objectif précis ? Mystère, car le détaillant n’a de toute évidence pas l’intention d’ajuster ce plan pour l’avenir. Comme à l’accoutumée, ces politiciens fouineurs aiment donner l’impression qu’ils font quelque chose. Peut-être pourraient-ils également s’inscrire à ce fameux webinaire sur « la gestion du changement » ?
Le débat social qui continue dangereusement de se polariser ne facilitera pas les choses. Et lorsque vos concurrents commencent aussi à s’en mêler, la situation devient inextricable. Le courrier adressé au ministre du Travail par le leader du marché de Halle est pour le moins remarquable. Colruyt en a apparemment assez de la concurrence des fausses chaînes de franchise et voit là l’occasion de contribuer à redessiner le paysage du commerce de détail.
Pas amusés
Jef Colruyt est-il finalement pessimiste ou positif ? Le partisan des magasins sans personnel a déjà laissé entendre qu’il trouve peu éthique de se servir des entrepreneurs indépendants comme de la chair à canon dans les tranchées. Fair enough. La Belgique est en effet le Bakhmout de la distribution alimentaire européenne, où les superpuissances internationales se bombardent à coups de promotions. Il propose donc de rendre la structure de coûts plus élevée pour tout le monde. Les syndicats ont applaudi. Je me demande ce que les exploitants de Spar ont pensé de cette communication quelque peu étonnante de leur grand patron. À Kobbegem, ils n’étaient en tous cas pas amusés. Indisposés. Humiliés, même.
Le service de presse de Halle s’est empressé d’apporter une nuance : « Les modalités exactes de cette simplification des commissions paritaires dépendent de nombreux facteurs qui devront encore être examinés avec plusieurs parties. » D’accord. Cette réaction est sortie après notre article d’opinion présentant les répercussions apocalyptiques d’un monde où tous les indépendants seraient assujettis à cette commission paritaire 202 plus chère : des paniers impayables et une vague de faillites, plus précisément. Si nous voulions pousser un peu plus le cynisme chez RetailDetail, nous pourrions aller jusqu’à dire : un tel banc de sang fera bien les affaires de Colruyt, non ? Mais vous nous connaissez : nous ne sommes pas si perfides.
Prêt à l’emploi
Mais l’agitation est contagieuse. Les actions chez Delhaize et Intermarché ont maintenu inspiré les syndicats chez Aldi, qui estiment que la pression de travail « infernale » est intenable et qui brandissent à leur tour la menace de la grève. Et pourquoi pas : la moitié de l’Europe est déjà à l’arrêt. Pas d’urgence : une réconciliation se prépare, avec du café Markus et des biscuits Gala. Bref, tout ira bien. LOL.
Dans l’industrie alimentaire, ce ne sont pas les grèves qui doivent nous inquiéter dans l’immédiat mais de nouvelles augmentations de prix et, si les sympathiques acheteurs des supermarchés ne les acceptent pas, peut-être aussi les faillites, car la rentabilité est fortement sous pression dans les usines. D’autant que ces supermarchés s’approvisionnent de plus en plus à l’étranger. J’ai vérifié : les choux de Bruxelles nettoyés venaient en effet du Maroc cette semaine. Chez Albert Heijn, on le comprend, mais qu’en est-il pour le défenseur des produits locaux Colruyt ? On s’y perd.
Pas de non
Le hasard n’existe pas, comme nous l’avons vu la semaine dernière. Alors que RetailDetail venait tout juste de publier son analyse sur les opportunités et les dangers pour les fabricants de marque de produire des marques privées, Lotus Bakeries a vécu son moment Olé. Het Nieuwsblad a révélé que cette pâte de speculoos hors de prix est également disponible sous la marque de distributeur pour à peine la moitié du prix. Même produit, provenant de la même usine. Comme la fameuse gaufre au chocolat de Mondelez que l’on trouve aussi chez Aldi sous une anagramme. On ne peut pas tromper le chocolatier Dominique Persoone. Les consommateurs, parfois. Mais plus maintenant, donc.
Et ce n’est pas tout : c’est un Captain of Retail réjoui qui a fait irruption au bureau aux alentours de midi jeudi. De retour d’une conférence de presse, apparemment… Ce n’est pas dans ses habitudes, mais Annick Van Overstraeten n’accepte pas qu’on lui dise non. Et si elle avait des nouvelles ? C’est officiel : le Pain Quotidien lance un véritable pain au cannabis. Une version légale, malheureusement : s’il ne vous offrira la défonce de votre vie, il vous mettra au moins de bonne humeur et surtout : il est bénéfique pour la santé intestinale. Ça promet pour la balade à vélo demain. Heureusement, il roule souvent à l’arrière, ai-je appris de source sûre.
Pas de poisson
D’ailleurs, à propos de la course : que Wout Van Aert remporte ou non la Vlaanderens Mooiste dimanche prochain, pour la direction de Jumbo, l’affaire est réglée : le groupe n’injectera plus de fortunes dans le cyclisme. Le robinet est fermé, la priorité est désormais le ROI. À quoi sert d’avoir un nom célèbre si le monde ne sait pas ce que vous faites ? La plupart des Flamands associent le nom Jumbo à Koppenberg, pas à un supermarché loin de chez eux. Personne ne sait non plus ce que signifie Visma.
Un indice : cela n’a rien à voir avec le poisson. Pas même avec un poisson d’avril. Ne vous laissez pas avoir demain ! À la semaine prochaine !