Tout d’abord, un ‘zero waste shop’ exclut-il toute forme de déchets ? Et comment un tel concept fonctionne-t-il dans la pratique ?
S.I.: « Nous tentons de limiter les déchets au minimum : chez nous vous ne trouverez certainement pas de sachets jetables. En contrepartie nous vendons des emballages durables, comme des bocaux en verre par exemple. Si un client se trouve dans le magasin et qu’il s’aperçoit qu’il a oublié son bocal, il peut en acheter un chez nous et le ramener par la suite.
Au nouveau de l’assortiment nous essayons de proposer une gamme alimentaire aussi large que possible, mais vu le concept la vente de viande, de poisson, de fromage ou du pain par exemple n’est pas réalisable. Par contre l’offre comprendra beaucoup d’autres produits frais comme des fruits, du lait, … pour n’en citer que quelques-uns. »
Comment composez-vous votre offre ? Est-il facile de trouver suffisamment de produits durables ?
S.I.: « Notre premier critère bien entendu est que le produit soit commercialisable sans emballage. De plus nous recherchons avant tout les produits bio, mais ce n’est pas toujours possible. Nous vendons également des articles qui permettent d’éviter les déchets, comme les bocaux en verre dont je parlais tout à l’heure, mais également des boîtes à pain ou encore des pailles en métal inoxydable (donc lavables). Hélas, il est toujours difficile d’être pionnier, car on a pas suffisamment de poids pour s’imposer. »
Vous pourriez renforcer votre poids : avez-vous – avant même l’ouverture de votre premier magasin – déjà des projets d’expansion ?
S.I.: « Je n’ai pas encore de projets concrets, mais je rêve déjà d’un magasin à Gand. Le message le plus fréquent que l’on me transmet sur Facebook est de savoir quand je débarquerai à Gand. Ce qui serait mieux encore, c’est que je puisse inciter d’autres à ouvrir des magasins de ce type et que nous puissions ensuite nous lancer sous un nom commun. »
Comment êtes-vous parvenue, sans avoir aucune expérience dans le retail, à créer ce concept pour le moins évident ?
S.I.: « Peut-être justement parce que je n’ai aucune expérience dans le retail : l’idée a germé lors de mon master en développement durable à Maastricht. Dans le cadre des cours on nous a parlé d’une île de déchets dans l’Océan Pacifique dont la superficie est 34 fois plus grande que l’ensemble des Pays-Bas ! De plus je connais certaines personnes qui tentent de vivre sans générer de déchets, même s’ils ont beaucoup de mal à trouver de bons produits sans emballage.
C’est pourquoi j’ai puisé mon inspiration à l’étranger, où il existe déjà quatre projets de ce type. Je n’ai pas eu de contact avec mes collègues au Texas et à Berlin, mais par contre j’ai me suis entretenue avec les initiateurs espagnols et italiens. Ils m’ont beaucoup appris, mais cela reste difficile de démarrer un tel concept et de tenir bon. Néanmoins nous nous sentons soutenus par des réactions positives. »
Un soutien dont vous avez grand besoin, car le crowdfunding pour le financement de votre projet ne se déroule pas comme vous le voudriez ?
S.I.: « En effet, j’ai sous-estimé cet aspect. A Berlin ils ont collecté 20000 euros en 24 heures, un montant que je m’étais fixé pour objectif final … mais au bout d’une semaine nous sommes loin du compte. L’ouverture de mon magasin n’est donc pas encore en vue, cela dépendra d’éventuels investisseurs et/ ou du crowdfunding.
Nous ne nous attendions pas à tant de publicité à un stade si précoce, mais c’est la création de notre compte Facebook qui a tout déclenché. Les réseaux sociaux jouent un rôle important pour notre magasin et nous comptons exploiter ce canal ! »
N’y a-t-il pas là un trop grand contraste ? Votre concept remonte pour ainsi dire à l’épicerie du temps de nos grands-mères ?
S.I.: « C’est partiellement vrai, mais pas entièrement. Ce concept du ‘zéro déchet’ est réellement utile, voire même nécessaire ! D’où notre nom ‘Robuust’ : on ne jettera pas facilement quelque chose de robuste.
Toutefois notre approche n’est pas vieillotte, au contraire nous voulons lui donner une touche moderne : le but est d’attirer également un public jeune, c’est pourquoi nous misons sur ‘le vécu’ … et sur Facebook. Le développement durable est un thème dont les jeunes se préoccupent, ce qui nous donne bon espoir ! »
En vous adressant spécifiquement aux jeunes, vous ciblez un groupe lourdement touché par la crise.
S.I.: « C’est exact, mais je suis convaincue que même les jeunes sont prêts à payer plus pour un produit de meilleur qualité. Nous ne sommes d’ailleurs pas plus chers qu’un simple magasin bio, mais par rapport aux supermarchés il peut y avoir des différences de prix. Comme nous nous approvisionnons auprès d’agriculteurs bio locaux, nous espérons que les jeunes y seront sensibles. »
Aujourd’hui tout tourne autour du e-commerce, même les produits frais sont livrés à domicile. Avez-vous des projets en ce sens ?
S.I.: « Oui, dès l’ouverture les clients pourront passer commande et venir la retirer le jour même entre 17h et 18h30. Après la phase de démarrage de six mois environ, j’envisage de lancer les livraisons domicile. Je pense à la région anversoise pour les produits frais, mais d’autres produits comme les pailles inoxydables pourraient très bien être livrés dans toute la Belgique. Après nous verrons bien … ».
Le magasin sans déchets Robuust ouvrira (probablement) ses portes le 29 juin dans le Reyndersstraat à Anvers.