Ouch ! Gros coup dur pour le leader du marché de Halle. Heureusement, votre chroniqueur préféré a aussi trouvé des motifs d’espoir. Histoire de retrouver un peu d’ambiance de Noël…. C’est de plus le dernier Filet Pur de l’année : profitez-en !
En chute libre
Même quand on n’attend pas grand-chose, il est toujours possible de faire moins bien : on vient encore de le prouver à Halle. Et l’information a dominé les pages économiques de tous les médias nationaux cette semaine. Avis et analyses se sont multipliés sur la chute libre de l’ancienne action vedette. Et RetailDetail y a évidemment ajouté son grain de sel. Nos experts ont ainsi pu donner leur interprétation des résultats de Colruyt dans Het Nieuwsblad et auprès des amis de VTM News, entre autres. En direct du parking de chez Colruyt, derrière le coin. Ils me connaissent bien là-bas.
Mais vous ne croirez jamais ce qui s’est passé ensuite : nos mots étaient à peine froids qu’un Paul D’Hoore remonté comme une pendule avaient déjà pénétré dans le studio, prêt à défendre la victime avec toute sa verve habituelle. « La recette du succès de Colruyt n’est pas éventée », s’est-il exclamé. S’ensuit une énumération des nombreuses qualités du seul food-retailer digne de ce nom qui nous reste en Belgique. Surtout de réalisations passées, mais quand même. Jef Colruyt aura sans doute eu les larmes aux yeux face à cet improbable concert de louange.
À la recherche de motifs d’espoir
Un compliment est toujours agréable, surtout quand ça fait longtemps qu’on n’en a pas reçu. Et chez RetailDetail, nous osons parfois être tranchants, c’est vrai. Mais bon, si nous n’avions point de défauts, nous ne prendrions pas tant de plaisir à en remarquer dans les autres, comme me le rappelait encore récemment mon bon ami François de La Rochefoucauld. Sur les réseaux sociaux cependant, certains ont froncé les sourcils. « Combien d’actions Colruyt ce soi-disant journaliste financier indépendant possède-t-il dans son portefeuille ? », s’est demandé l’un. « Il essaie de récupérer sa mise ? » Ou un autre : « N’est-ce pas plutôt DPG Media qui veut protéger un grand et fidèle annonceur ? » De notre côté, nous ne suggérons rien.
Mais bon, nous sommes généralement de bonne volonté, et encore plus à l’approche de Noël. Nous avons donc cherché des motifs d’espoir. Le chiffre d’affaires de Colruyt Group résiste bien malgré une base de comparaison délicate ? Bof, si vous virez la moitié des produits de grande consommation de vos rayons, vous ne devez pas vous attendre à une croissance au prochain semestre. La part de marché qui ne diminue plus, malgré tout ? Pas difficile quand vos concurrents sont fermés ou proposent des rayons vides à cause de grèves et autres problèmes logistiques.
L’odeur du sang
La poussée de croissance du commerce de proximité n’aura finalement été qu’un phénomène temporaire, c’est peut-être la seule bonne nouvelle à laquelle le retailer peut se raccrocher. Le comportement des consommateurs se normalise. Mais ces marges bénéficiaires ne reviendront pas avant un certain temps, et Jef le sait mieux que quiconque. À cause de ces f… Hollandais, en premier lieu. Ahold Delhaize a humé l’odeur du sang. Il ne faut pas s’attendre à ce qu’ils lèvent le pied. Jumbo, pour sa part, est venu prendre ses quartiers à Kuurne cette semaine. Le Péril jaune peine encore à se matérialiser, mais il joue habilement sur la perception. Et n’oubliez pas les Allemands.
En attendant, laissez le consommateur comparer les prix, hors et en ligne. Le célèbre Téléphone rouge est désormais un smartphone rouge. Tout le monde le sait : la situation ne risque pas de s’améliorer sur le front des prix et des promotions l’année prochaine. Et ce, alors que les coûts continuent d’augmenter. Between a rock and a hard place, comme disent les Anglais. Et ce n’est pas l’endroit le plus confortable. Ces résultats risquent aussi d’avoir un impact sur les négociations annuelles déjà « tendues » avec les marques. Nous garderons un œil sur les rayons vides dans les semaines à venir.
Saignée
L’action redevient peu à peu abordable. Ce n’est pas rien. Sauf pour les fidèles employés fidèles qui voient leur bonus en actions partir en fumée au moment où ils s’apprêtaient à acheter leurs cadeaux de Noël. La fête s’annonce sobre. Un Noël glacial. Ici et là, des doigts accusateurs pointent Jef : après presque trente ans, un changement de la garde s’impose, affirment certains. Ce n’est pas la première fois, mais les appels au renouvellement résonnent de plus en plus fort. Espérons qu’ils ne soient pas entendus : ce serait une perte. Pour Filet Pur, en tout cas.
Mais là encore, que voulez-vous ? Dans la tempête, tout le monde se tourne vers le capitaine. Et que fait ce dernier ? S’accrocher à une stratégie datant des années 1990, alors que ses concurrents viennent piquer des clients à grands coups de prix tout aussi bas, d’assortiments surprenants et des magasins beaucoup plus agréables ? Maintenir obstinément que la livraison à domicile n’est pas viable alors que Bébert se dirige allègrement vers le leadership du marché en ligne ?
Otages
Le fait que Colruyt Group ait été pris de vitesse par Lambrechts, pourtant beaucoup plus petit, dans le lancement d’une plateforme en ligne intelligente pour les entrepreneurs indépendants aurait dû être un signal d’alarme. Oui, les propriétaires de magasins Spar ont désormais eux aussi leur outil en ligne. Mais ce n’est au fond qu’un formulaire de commande amélioré. Bref : il faudra chercher ailleurs. Et le temps presse.
Parce qu’Amazon est en route. Littéralement. Le géant de l’e-commece vient livrer les courses à notre porte. Dans toute l’Europe Les courses d’autres chaînes de supermarchés, d’ailleurs. Comme Morrisons à Londres, ou Monoprix à Paris. Et à Bruxelles et dans ses environs ? Aucune décision n’a encore été prise, manifestement. Si j’étais Jef, je décrocherais le téléphone. Car Amazon ne peut pas tout faire tout seul et a l’intention de tout mettre en œuvre pour lier encore plus fermement à elle ses fidèles membres Prime. Ce qui commence un peu à ressembler à une prise d’otage, soit dit en passant.
Nouvelles du front
Pourrait-on bientôt voir des Visétois se faire livrer leurs courses depuis Maastricht ? Ce serait intéressant, car bientôt, il sera bientôt encore plus intéressant de faire ses courses de l’autre côté de la frontière. Car les Néerlandais ont enfin un nouveau gouvernement et celui-ci va non seulement imposer une taxe sur le sucre – une vraie, pas comme celle que Maggie De Block nous avait concoctée – mais aussi réduire la TVA sur les fruits et légumes de 9% à 0%. Zéro pour cent, vous avez bien lu. Ça, c’est du Nutri-Boost. Si l’Europe donne son accord, bien sûr, mais quand même.
Pour conclure, quelques étonnantes nouvelles du front. Car la guerre entre les supermarchés et les producteurs fait rage dans toute l’Europe. Et ceux qui pensaient que les détaillants gagneraient haut la main pourraient devoir revoir leur jugement. C’est l’escalade. En Allemagne, un producteur déterminé n’a pas hésité à mettre la plus grande chaîne de supermarché dos au mur.
Arroseur arrosé
Authentique : Essity, que nous connaissons pour des marques comme Edet, Lotus, Okay ou Demak’Up, va purement et simplement cesser de fournir Edeka, le leader sur le marché. Jusqu’à ce qu’ils acceptent les augmentations de tarifs. Bam ! Le coup de l’arroseur arrosé. Il faut dire que la multinationale fournit une denrée rare et indispensable : le papier toilette. Et il n’y a pas beaucoup de concurrents. Ça aide dans les négociations. Curieux de savoir combien de temps ils vont pouvoir (se re)tenir outre-Rhin. Et si nous aurons droit à la même partie de poker menteur.
Petite communication de service pour terminer : c’était le dernier Filet Pur de l’année. Votre serviteur avait encore dix-huit jours de congés à prendre après cette année bien chargée. Tout doit partir. Mais la semaine prochaine, vous aurez droit à la grande rétrospective de l’année du food-retail. Bonne fête et à l’année prochaine !
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