Les co-auteurs Jorg Snoeck et Stefan Van Rompaey ont fait lire en avant-première leur livre The Future of Food à Frans Muller, PDG d’Ahold Delhaize, et lui ont demandé de réagir. Il est très important que nous nous attaquions à la complexité de cette question, souligne-t-il.
La transformation coûte de l’argent
« Dans la chaîne de transformation alimentaire, les défis sont grands, dans différents domaines : pensez au climat, à la sécurité alimentaire, aux écosystèmes, aux déchets, aux relations sociales… C’est pourquoi il est important de considérer l’ensemble de la chaîne, dans tous ses aspects, de l’agriculteur au consommateur. C’est également une condition préalable à une meilleure adéquation entre l’offre et la demande. »
« Pour cela, nous ne pouvons pas nier la réalité économique. La transformation coûte de l’argent. Qui va payer pour ça ? Tous les acteurs de la chaîne veulent aussi gagner de l’argent : l’agriculteur, le fabricant, le détaillant… Les rapports concurrentiels entrent en jeu et il ne faut pas perdre de vue le pouvoir d’achat du consommateur. Par conséquent, la transformation ne peut aboutir qu’à partir du moment où certains éléments sont considérés comme pré-concurrentiels : le financement des efforts climatiques, les incitations à l’agriculture régénérative… »
Défini des règles du jeu équitables
« Le financement et le soutien seront essentiels pour permettre la transition vers un système alimentaire plus durable, de l’agriculteur au consommateur. Le rôle que peut ici jouer le gouvernement est de définir des règles du jeu équitables. Le Green Deal européen, avec sa stratégie « Farm to Fork », donne une bonne impulsion pour lancer le mouvement, même si l’on peut se poser des questions critiques sur certains choix. »
« Il faudra redoubler d’efforts pour sensibiliser les consommateurs et rétablir la confiance. Le secteur alimentaire devra présenter un plan d’action convaincant, communiquer ouvertement et honnêtement, s’affirmer comme un partenaire fiable. Nous pouvons orienter les choix de consommation, mais pas les imposer. Je pense que la standardisation des informations, avec les étiquettes nutritionnelles (le Nutri-Score, les Guiding Stars…), et peut-être plus tard l’étiquetage climatique, peut jouer un rôle important. »
Le supermarché omnicanal va perdurer
« Les questions climatiques et les dilemmes environnementaux ne peuvent plus attendre : nous devons tout mettre en œuvre pour atteindre une croissance (nette) nulle des gaz à effet de serre, rétablir la biodiversité, assainir les sols… La technologie et la numérisation nous y aideront. Les économies d’échelle et les développements technologiques iront de pair avec l’authenticité et le naturel. Les substituts de protéines animales sont importants pour lutter contre le changement climatique. Je pense que les supermarchés omnicanaux resteront le canal d’achat le plus important pour la majorité du marché des consommateurs. »
« La crise du Covid a renforcé un certain nombre de choses en matière de sensibilisation. Les consommateurs ont commencé à cuisiner davantage à la maison et ont ainsi développé un plus grand respect pour la nourriture et la production. La commodité est devenue encore plus importante, la santé est devenue une priorité, tout comme l’attention portée au climat. »
Dernière question : qu’est-ce que Frans Muller espère trouver dans son assiette d’ici à 2030 ? « Si nous protégeons les réserves halieutiques durables, je serais ravi de retrouver une belle sole, un turbot ou une barbue dans mon assiette en 2030. »
The Future of Food – A New Recipe for the Food Sector est publié par Lannoo Campus en Belgique et par Van Duuren Management aux Pays-Bas. Il est désormais également disponible en anglais. Disponible dans les meilleures librairies et via ce lien pour les commandes de plus gros volumes.