Quelle est la meilleure option pour l’environnement : aller au magasin ou commander en ligne ? Et comment la rendre encore plus durable ? Safeshops s’est penché sur la question et est arrivée à une conclusion surprenante.
Cinq fois moins de CO2
Une paire de chaussures commandées sur Internet auprès d’une boutique en ligne belge présente une empreinte carbone cinq fois plus faible qu’une même paire achetée dans un des magasins du même retailer. C’est la conclusion étonnante à laquelle est arrivée la fédération du commerce électronique Safeshops dans un nouveau rapport. L’analyse de la littérature spécialisée montre que les achats en ligne sont plus durables que les achats en magasin, du moins à quantité égale et dans des conditions moyennes.
Mais bien sûr, ce n’est jamais aussi simple dans la pratique. Environ la moitié de l’impact environnemental de l’e-commerce provient des émissions dues au transport, et ce transport varie considérablement selon les lieux et les consommateurs. Rien que la différence entre la ville et la campagne est énorme, mais l’évolution de comportement des consommateurs est un autre obstacle.
Une question de concentration…
Dans les zones rurales, les distances entre les consommateurs sont plus grandes et les commandes en ligne plus faibles. Par conséquent, les livreurs doivent parcourir de plus longues distances pour chaque colis, ce qui rend la livraison à domicile à la fois plus coûteuse et moins durable. Mais ils émettent toujours moins que des consommateurs qui se rendent individuellement en voiture dans les magasins, comme ils le font aujourd’hui en majorité.
Dans les zones urbaines, les consommateurs sont plus enclins à se déplacer à pied ou à vélo, bien que la moitié des consommateurs bruxellois se rendent encore aux points d’enlèvement en voiture. Mais les citadins vivent plus près les uns des autres et commandent plus souvent en ligne, ce qui augmente la densité de livraison et réduit le kilométrage par colis.
La perversité de la commodité
Pour calculer l’impact environnemental réel de l’e-commerce, il faut tenir compte l’impact de la numérisation sur le comportement des consommateurs. En effet, l’e-commerce produit aussi plus d’émissions indirectes : Safeshops admet volontiers que les innombrables offres en ligne incitent à consommer davantage. En outre, ces achats sont souvent fractionnés en plusieurs commandes et livraisons en ligne. Paradoxalement, le temps que les consommateurs gagnent en faisant leurs achats en ligne est souvent affecté à d’autres déplacements.
Autre conséquence perverse de ce qui pourrait être une solution durable : l’e-commerce a redessiné le paysage du retail au profit de grandes boutiques en ligne sans empreinte locale. Ces boutiques en ligne étrangères dépendent davantage du transport aérien et du transport sur de longues distances, ce qui augmente leur impact environnemental. Près de la moitié des consommateurs belges pensent qu’une boutique en ligne de qualité est attentive à la durabilité, mais trois quarts d’entre eux sont incapables de citer spontanément un bon exemple.
L’e-commerce pourrait être plus durable
L’e-commerce pourrait donc être plus durable que les achats physiques, mais c’est rarement le cas dans la pratique. Comment les retailers pourraient-ils réduire l’impact environnemental de leurs activités en ligne ? Les solutions possibles combinent informations et adaptations logistiques. Les consommateurs ont eux aussi un rôle actif à jouer, car ils doivent prendre conscience que la « livraison normale » n’est pas normale.
La livraison gratuite le lendemain est devenue un impératif auquel les retailers doivent oser déroger, affirme Safeshops. La fédération professionnelle encourage les boutiques en ligne à adapter leurs créneaux de livraison à la charge de travail et à utiliser des lieux d’enlèvement.
Pas de livraisons urgentes
Une idée circule depuis longtemps sans jamais avoir été adoptée à grande échelle : l’option « pas pressé ». En plus de la livraison express ou standard, il devrait également exister une option pour ceux qui n’en ont pas besoin d’une livraison urgente. Les livreurs pourraient alors collecter et regrouper les colis destinés à une même ville ou à une même rue, ce qui permettrait d’effectuer des trajets plus courts avec des véhicules plus remplis.
Des plages horaires clairement définies permettraient de s’assurer que les consommateurs sont effectivement chez eux quand on sonne à leur porte. Elles éviteraient ainsi d’imposer un déplacement jusqu’à un point de ramassage ou – pire encore – de revenir une autre fois. Les boutiques en ligne pourraient par exemple utiliser des plages horaires étroites de 30 minutes à deux heures pour les livraisons en quelques jours et des plages horaires plus larges, du matin au soir, pour les livraisons le lendemain. Elles disposeront ainsi d’une plus grande flexibilité pour planifier les livraisons.
Les consommateurs souhaitent participer
De toute manière, la livraison à domicile n’est l’option la plus efficace que lorsque les lieux d’enlèvement sont rares et les consommateurs ne peuvent aller chercher leurs colis qu’en voiture. Sans doute n’est-ce le cas que dans les zones rurales. Dans toutes les autres situations, la livraison à un magasin ou à un autre point d’enlèvement est plus respectueuse de l’environnement. S’il faut livrer à votre porte, Safeshops recommande des « derniers kilomètres » décarbonés via des partenaires qui utilisent des véhicules électriques (des fourgonnettes aux vélos-cargos) à partir de leurs hubs.
Si c’est gratuit, les consommateurs n’auront rien contre le fait d’attendre plus longtemps. Mais rares sont ceux qui ne savent pas quelle est l’option la plus durable. C’est donc au retailer de faire la différence. Bien sûr, il peut rendre les options plus polluantes plus chères – ce qui serait d’ailleurs logique puisqu’elles sont aussi plus chères pour le détaillant –, mais ne sous-estimez pas le pouvoir de la communication. Des études ont montré que des informations sur les différences d’impact environnemental sont encore plus puissantes que la différenciation des prix.