Zeeman prouve qu’il est possible de promouvoir la durabilité tout en affichant des prix bas. Avec toute l’obstination et la parcimonie que l’on connait des Hollandais, le détaillant est en train de bâtir une success-story européenne : « Nous allons nous implanter dans un huitième pays l’année prochaine. »
La renaissance du commerce de proximité
L’un dans l’autre, la chaîne textile Zeeman est sortie indemne de la crise du coronavirus, selon le PDG, Erik-Jan Mares. « Financièrement, nous n’avons jamais frôlé les problèmes. Nous sommes présents dans sept pays, et nous n’avons jamais été fermés simultanément sur nos sept marchés. Au début de la crise, alors que les magasins en Belgique et en France ont dû fermer leurs portes, ceux des Pays-Bas sont restés ouverts. Et quand les magasins des Pays-Bas ont dû fermer, ceux en France et en Belgique étaient ouvertes. A posteriori, la chance était de notre côté. Nous avons également assisté à la renaissance du commerce de proximité. Les grands centres commerciaux étaient désertés, mais la plupart de nos magasins sont installés à côté d’un supermarché, d’un Action ou d’un Kruidvat. De plus, nous sommes un magasin de base, nous vendons des articles d’habillement de base. Tout le monde en a besoin, les enfants grandissent… »
Il convient de souligner que Zeeman n’a pas répercuté les problèmes sur ses fournisseurs. Alors que de nombreuses entreprises de mode ont annulé des commandes et allongé les délais de paiement, Zeeman a fait l’inverse : « Nous avons envoyé une lettre à tous nos fournisseurs pour reconfirmer notre courte période de paiement de 14 jours, parmi les plus courtes du secteur. Nous avons reporté certaines commandes, mais n’en avons annulé aucune. Nous travaillons avec des contrats cadres, qui nous laissent toujours une marge de manœuvre. Nous le faisions également avant le coronavirus. Nous travaillons différemment. »
Message cohérent
Et c’est justement ce « différemment » qui est peut-être au cœur de sa réussite : « Les Belges trouvent souvent que les Hollandais sont bornés, et à raison. Mais nous sommes surtout excentriques : nous sommes convaincus que nous faisons mieux les choses à notre manière. Depuis notre création en 1967, nous nous étonnons de voir que tout doit être aussi complexe et coûteux. Nous voulons donc montrer de façon subtile que nos produits sont de très bonne qualité et proposés à un prix avantageux. Nous le faisons intelligemment, avec peu de ressources. Il s’agit de garder un message cohérent et de chaque fois trouver une accroche qui montre que l’on veut que les choses restent simples. »
Ainsi, le détaillant textile est également devenu une marque emblématique ces dernières années, avec des initiatives marketing remarquables comme le lancement de collections exclusives pour les fans (baskets, hoodies…) ou la vente de vêtements de seconde main. S’il y a un masterplan intelligent derrière tout ça ? « C’est simplement ce que nous sommes », pense Mares. Cela aide la chaîne à attirer de nouveaux clients.
Parcimonie hollandaise
Il boit une gorgée d’une gourde Dopper personnalisée pour Zeeman. Elle porte l’inscription « I am zuinig ». (fr : « Je suis économe ») « Nous n’avons plus de gobelets en plastique au bureau, mais des Doppers. Au final, c’est moins cher et mieux pour l’environnement. » Cette parcimonie typiquement hollandaise, Zeeman s’en dit très fier.
« Il ne faut pas seulement se soucier des questions financières mais aussi de son prochain, de l’environnement, de la société, de tous les acteurs de la chaîne. En tant qu’entreprise familiale, nous travaillons sur le long terme et ne dévions pas facilement de notre chemin. Nous avons choisi d’être à l’avant-garde de la durabilité parce que cela correspond à notre marque et à notre rôle dans le secteur de l’habillement. Sinon, vos parties prenantes se retourneront contre vous. Nous voulons avoir une longueur d’avance. C’est dans nos gènes et c’est lié à cette parcimonie. »
Le plus grand malentendu
C’est pourquoi Zeeman s’oppose catégoriquement l’idée qu’un produit bon marché ne peut pas être durable. « Le plus grand malentendu qui soit ! Bon et bon marché peuvent parfaitement aller de pair. Cela dépend beaucoup du mode de fonctionnement de votre entreprise. Regardez, nous vendons beaucoup de T-shirts blancs, de la taille XS à XXL. Nous n’avons pas de coupes différentes, tout au plus un col en V et un col rond. Si vous faites de gros volumes, l’usine n’a pas besoin de faire des ajustements réguliers et cela permet d’économiser beaucoup d’argent. Comme nous payons à temps, les travailleurs du Bangladesh ne doivent pas aller à la banque pour obtenir un prêt coûteux. Ce n’est pas si difficile ! »
Si l’industrie de la mode est un gros pollueur, Zeeman prône la « slow fashion ». « Les Primark et les H&M d’aujourd’hui sortent une nouveauté toutes les trois semaines ; nous non. 80 % de notre gamme se composent de T-shirts blancs, de sous-vêtements, de chaussettes, de serviettes… Et nous discutons constamment avec nos fournisseurs pour que notre gamme soit chaque jour un peu plus durable. »
Seconde main
L’ouverture de coins d’articles de seconde mains dans certains magasins aux Pays-Bas suit également la même logique. « Nous avons mis en place un projet pilote consistant à collecter des vêtements de seconde main dans nos magasins. Nous les donnons gratuitement à Het Goed, une chaîne de magasins de réutilisation. Elle nettoie les vêtements. Dans six de nos principaux magasins, nous rachetons des vêtements que nous revendons ensuite en occasion. Il peut s’agir d’articles provenant de Hema, H&M, Gucci… Nous essayons ainsi d’apporter notre pierre à l’édifice. Bien entendu, la vente d’articles d’occasion est également très tendance. C’est exceptionnel que Zeeman ait été parmi les premiers à le faire aux Pays-Bas. »
Le test se déroulera aux Pays-Bas jusqu’à la fin de cette année. Si le projet est un succès, il sera ensuite étendu à la Belgique. « Ce qui est bien, c’est que nous pouvons transporter ces articles avec nos camions depuis Alphen jusqu’en Belgique, ce qui permet également de réduire l’empreinte écologique. Nos deux filles commandent sur Vinted, et reçoivent leurs colis de Barcelone. Certes, il s’agit de produits d’occasion, mais est-ce pour autant bon pour l’environnement ? »
Nouveaux clients
Au Benelux, Zeeman est déjà presque partout. La croissance autonome est donc plus importante que l’expansion : grâce à une meilleure disponibilité, un marketing plus efficace et en attirant un autre type de client. « Pour Zeeman, la véritable croissance doit provenir de nouveaux pays et de nouveaux clients », déclare Mares. « Nous avons deux types de clients : le client qui achète chez Zeeman parce qu’il n’a pas les moyens d’acheter ailleurs, et le client qui veut acheter chez Zeeman parce qu’il trouve absurde de payer trop cher pour des produits de base. Nous voulons également attirer davantage ce nouveau client en Belgique. Cette tendance aide. Nous sommes de plus en plus populaires. »
La crise du coronavirus a également entraîné une croissance exponentielle du commerce électronique. Cette évolution est arrivée un peu trop tôt pour Zeeman, mais le détaillant en a tiré de nombreux enseignements. « Nous avons suivi une courbe d’apprentissage rapide, de sorte que nous sommes maintenant plus avancés que nous l’aurions été autrement. Finalement, c’était une bonne chose. Je pense que nous serons en mesure de mener une opération rentable dans le courant de l’année prochaine. Depuis le 1er mai, nous travaillons avec un partenaire belge d’exécution, Katoen Natie, pour notre commerce électronique. C’est un partenaire très professionnel, nous sommes très heureux de ce changement. Avec eux, nous espérons aussi conquérir l’Europe. »
Huitième pays
Néanmoins, le commerce en ligne ne représente toujours que quelques pour cent du chiffre d’affaires de Zeeman. « Nous ne sommes actifs en ligne que dans deux pays. Nous allons ouvrir une boutique en ligne en France à la fin de cette année. Et nous allons nous implanter dans un huitième pays l’année prochaine, à la fois avec des magasins physiques et un webshop. Non, je ne vous dirai pas où… »
Erik-Jan Mares nous en dira peut-être plus sur les futures projets de Zeeman lors du RetailDetail Day, qui aura lieu le jeudi 16 septembre à Anvers. Des représentants de Mars Food, Colruyt Group, C&A et Dobbi seront également au rendez-vous lors de cette conférence marketing pour le secteur de la distribution. Nous annoncerons les noms d’autres intervenants prochainement. Il s’agira d’un événement hybride : 200 places sont disponibles pour les participants qui souhaitent vivre le congrès sur place, en toute sécurité. Les autres pourront suivre à distance la diffusion en direct. Suivez ce lien pour retrouver de plus amples informations et réserver vos billets.