Actuellement, l’impact de la technologie d’impression 3D est plus que palpable dans des secteurs comme la construction, l’automobile, le design et la mode. On peut imprimer en 3D une maison entière, des montures de lunettes ou des baskets personnalisées. De consommateur, on devient producteur. Mais que peut-on faire avec cette technologie dans le domaine alimentaire ? Bien des choses, en fait.
Tremplin pour la créativité
Pour faire simple, les imprimantes 3D créent des objets tridimensionnels à partir de fichiers numériques, généralement couche par couche. Cela permet aux concepteurs et aux fabricants de produire des formes très complexes en relativement peu de temps et avec un minimum de matériaux utilisés.
Début 2020, le géant du chocolat Barry Callebaut avait annoncé l’ouverture du tout premier studio d’impression 3D dédié à « la création d’expériences uniques autour du chocolat ». La technologie permet de créer à grande échelle du chocolat personnalisé imprimé en 3D. Les chefs peuvent désormais imaginer des créations uniques et les reproduire rapidement et à un coût abordable, quelle que soit la complexité du modèle. Les créations peuvent être utilisées pour des desserts, des confiseries, des boissons chaudes et des pâtisseries. Ce nouveau service est donc surtout destiné aux chefs et aux hôtels, chaînes de cafés et autres établissements de restauration. Cet investissement témoigne des espoirs fondés dans la percée de l’impression 3D.
D’autres grands producteurs alimentaires sont intéressés. PepsiCo utilise l’impression 3D pour tester de nouvelles formes pour les chips et les snacks, Hershey’s s’en sert pour concevoir des bonbons et Oreo pour personnaliser des biscuits. Le spécialiste des épices Verstegen se voit déjà jouer un rôle en tant que fournisseur de garnitures pour les modèles alimentaires.
Suivant la même logique, le producteur de pâtes Barilla utilise l’impression 3D depuis 2016 pour créer des pâtes de formes complexes et créatives. L’entreprise a fait développer une imprimante 3D capable de produire une pâte en trente secondes. L’objectif est de préparer une assiette entière de pâtes en deux minutes. Barilla organise des concours de design, mettant les participants au défi de créer des formes de pâtes inédites et créatives pour l’imprimante 3D. Mais le fabricant va également au-delà de l’esthétique pure : cette imprimante peut également modifier le goût, la texture et la valeur nutritionnelle des aliments, offrant ainsi potentiellement la possibilité d’adapter les recettes de pâtes à certaines restrictions alimentaires, comme pour un régime sans gluten.
Un repas sur mesure
Car c’est la promesse de l’impression 3D : personnaliser et adapter les aliments en fonction des besoins alimentaires spécifiques de manière efficace et évolutive. L’impression 3D permet d’imprimer des aliments qui vous conviennent parfaitement en fonction de vos données biologiques, de vos préférences gustatives et de votre santé. Ainsi, FrieslandCampina se penche sur l’impression 3D des protéines de lait en partenariat avec l’université de Wageningen. De cette manière, le fabricant de produits laitiers pourrait adapter les produits aux besoins des consommateurs ayant des problèmes de santé ou suivant un mode de vie spécifique. FrieslandCampina veut donner aux produits à faible teneur en matières grasses une texture en bouche plus crémeuse.
Une autre application est le développement d’aliments savoureux à la texture moins compacte, plus faciles à manger pour les personnes ayant des difficultés à mâcher et à avaler, comme les personnes âgées ou les personnes ayant souffert d’un accident vasculaire cérébral. Jusqu’à présent, elles sont restreintes aux plats mixés peu appétissants et peu nutritifs. L’impression 3D peut leur venir en aide : la technologie permet d’imprimer des composants de repas qui ont la bonne taille et la bonne texture, et qui sont très proches des ingrédients originaux en matière d’apparence, de goût et d’expérience. Il est ainsi possible d’imprimer des repas personnalisés et savoureux, et la composition nutritionnelle de chaque repas peut être adaptée aux besoins personnels du consommateur.
Des sushis ultra-personnalisés
Sushi Singularity, un étonnant restaurant futuriste à Tokyo, montre l’étendue des possibilités. Le restaurant sert des sushis imprimés en 3D ultra-personnalisés en fonction des besoins de chaque client, tant en matière de santé que de nutriments. Les clients qui font des réservations doivent fournir des échantillons biologiques dans un kit de test de santé. Les données biométriques et ADN récoltées grâce à ces kits sont utilisées pour créer une infusion personnalisée de nutriments. Les sushis codés, personnalisés selon les besoins nutritionnels de chaque client, sont ensuite créés avec soin par des imprimantes 3D et la technologie laser.
Il s’agit d’un projet de la société Open Meals, qui s’est donnée pour objectif de numériser l’ensemble de l’industrie alimentaire. La start-up développe des « cartouches » pour imprimantes alimentaires, avec des ingrédients durables tels que des algues, des grillons et des nutriments adaptés au profil de santé de chacun. Open Meals développe également un système d’exploitation pour la conception numérique des aliments.
La NASA prépare des pizzas
De la science-fiction ? Même pas. L’organisation spatiale NASA voit également dans l’impression 3D une solution potentielle pour varier le menu des astronautes et peut-être, à terme, celui des colons martiens. Une spin-off de l’agence spatiale étudie les possibilités de produire des repas nutritifs dans des conditions difficiles grâce à la technologie 3D. Utiliser tous les ingrédients tels que les glucides, les protéines et les macro- et micronutriments sous forme de poudre garantit leur longue durée de conservation.
Les utilisateurs peuvent ensuite mélanger ces ingrédients pour créer différents repas nutritifs. Comme la pizza : le système imprime d’abord la pâte, suivie d’une couche de sauce tomate, qui consiste en une poudre mélangée à de l’eau et de l’huile. Ensuite, la pizza imprimée en 3D est recouverte d’une couche de protéines d’origine animale, laitière ou végétale. Voilà qui change des repas monotones généralement servis aux habitants de la ISS. L’impression 3D est également utilisée pour la production de viande in vitro : la société israélienne Aleph Farms a en effet imprimé son premier steak in vitro grâce à cette technologie.
De déchets à délicatesses
L’impression 3D permet également des applications durables pour le traitement des excédents alimentaires. C’est le cheval de bataille de Upprinting Food, une start-up fondée par des étudiants en design industriel de la Technische Universiteit Eindhoven, dont la devise est « Donner un nouveau goût aux déchets alimentaires ». Leur concept permet de réutiliser des aliments qui finissent généralement à la poubelle : le vieux pain, mais aussi les légumes et les fruits moins appétissants. Ils les transforment en purée, qui est ensuite introduite dans l’imprimante 3D qui lui donne les formes voulues.
Ces formes sont ensuite cuites et séchées afin de prolonger leur durée de conservation. Résultat ? Des crackers ou des cookies durables. Upprinting Food cible en priorité les restaurants, où les chefs peuvent laisser libre court à leur créativité en utilisant les déchets générés sur place. La start-up entrevoit également un potentiel dans les supermarchés. Et qui sait, peut-être qu’un jour ces imprimantes 3D trouveront leur chemin jusque dans nos cuisine, permettant aux familles de traiter leurs propres déchets.
Impression dans la cuisine
La première imprimante 3D destinée à un usage particulier est désormais une réalité. Le « Foodini » veut se faire sa place aux côtés du blender ou du robot de cuisine. Cet appareil n’utilise pas les cartouches alimentaires standard ni les cartouches utilisées par les autres imprimantes 3D, mais dispose de cinq récipients que vous pouvez vous-même remplir avec des ingrédients frais comme des sauces ou de la pâte, salées ou sucrées. Vous pouvez ensuite imprimer vos créations directement sur une assiette, ou dans un plat pour les faire cuire au four.
Cela permet aux cuisiniers amateurs d’expérimenter de nouvelles formes, saveurs et textures dans leur cuisine. Grâce à l’application pour smartphone reliée, vous pouvez créer vos propres motifs ou utiliser des modèles préexistants. L’appareil n’est pas donné mais, pour la somme de quatre mille dollars, vous avez un appareil vraiment unique.
Cet article est basé sur un extrait du livre « The Future of Food » de Jorg Snoeck, fondateur de RetailDetail, et Stefan Van Rompaey, rédacteur en chef, qui sera publié par Lannoo Campus et Van Duuren Management fin septembre.