Plus de la moitié des promotions des catalogues des supermarchés belges portent sur des aliments malsains et ultra-transformés. Cela doit changer : « Les supermarchés se cachent derrière les fabricants de marques. »
« Besoin d’une volonté politique »
Pendant plus d’un an, l’institut de santé Sciensano a analysé les promotions des catalogues d’Aldi, Carrefour Market, Colruyt, Delhaize et Lidl. Seuls dix pour cent des plus de 15 000 promotions concernaient les fruits et légumes frais. Plus de la moitié portaient sur des produits moins sains et ultra-transformés tels que des snacks, des pizzas, des sauces, des sucreries, des boissons gazeuses ou des viandes transformées. Chez Colruyt, cette proportion était même de 62 %, contre « seulement » 42 % chez Lidl. Pourtant, les premières pages affichaient souvent des produits sains et frais.
Dans une interview accordée à De Standaard, la chercheuse Stefanie Vandevijvere reconnaît que les supermarchés ont déjà déployé des efforts en faveur d’une alimentation saine, notamment avec leurs marques de distributeur et l’introduction du Nutri-Score. Mais en tant que vendeurs, ils peuvent aller plus loin, estime-t-elle : « Ils se cachent derrière les exigences des fournisseurs et des grandes marques, mais ils font largement le poids pour s’y opposer. » Elle appelle le gouvernement à intervenir : « On pourrait envisager une taxe sur les produits mauvais pour la santé, une subvention pour les produits plus sains ou une combinaison des deux. Cela demande une volonté politique. » En Belgique, les mauvaises habitudes alimentaires constituent la troisième cause de maladie, après le tabac et l’hypertension artérielle. « De plus grands engagements de la part des entreprises et des autorités pour réduire la promotion des aliments qui ne sont pas sains auraient un effet positif sur la santé publique », déclare Vandevijvere.
Exemple britannique
Les chaînes de supermarchés concernées nuancent les conclusions de Sciensano. Colruyt souligne que de nombreuses promotions sur les fruits et légumes ne figurent pas dans le catalogue parce que les prix fluctuent souvent à court terme. Delhaize promeut une alimentation saine grâce aux réductions Nutri-Score pour les clients détenant une carte de fidélité, mais ne veut pas empêcher les consommateurs de grignoter de temps en temps.
Pourtant, la demande de réglementation des promotions sur les aliments malsains n’est pas inédite. Dès l’année prochaine, le Royaume-Uni introduira des restrictions strictes pour les promotions sur les produits alimentaires à forte teneur en graisse, en sel ou en sucre. À partir d’avril 2022, les distributeurs ne seront plus autorisés à proposer des promotions « multibuy » de type « 1+1 gratuit » ou « 3 pour le prix de 2 » pour ces produits. En outre, ils ne plus pourront exposer ces produits dans les endroits les plus visibles des magasins, comme à proximité des caisses ou sur les têtes de gondole. Il peut sembler surprenant que cette décision ait été portée par le Premier ministre Boris Johnson, qui a toujours été un fervent défenseur de la liberté individuelle. Mais depuis qu’il a été contaminé par le coronavirus, un virus plus susceptible de développer des formes graves chez les personnes en surpoids, il a changé son fusil d’épaule.