Le succès des grandes plateformes internationales de e-commerce a fait émerger une nouvelle catégorie d’acquéreurs. Les entreprises spécialisées recherchent des webshops à acquérir en fonction de leur succès sur ces plateformes. Au bout de quelques années, ces boutiques en ligne atteignent souvent un plafond et doivent alors décider si elles souhaitent consentir d’importants investissements pour poursuivre leur croissance.
Thrasio et Perch aux USA comme modèles
Ce phénomène est apparu, comme souvent dans ce domaine, il y a quelques années aux États-Unis : là-bas, les activités d’acheteurs spécialisés, comme Thrasio et Perch, sont florissantes. Leur modèle a désormais traversé l’océan : Het Financieele Dagblad s’est penché sur la société hollandaise Dwarfs.
Le co-fondateur, Demian Beenakker, ne cache pas s’être inspiré de ses homologues américains. « Thrasio a développé un modèle d’entreprise fantastique et cela nous a ouvert les yeux », indique-t-il. Ce modèle est assez simple : Dwarfs repère des webshops indépendants et performants sur les grandes plateformes de vente en ligne, comme celles de bol.com ou d’Amazon, et tente ensuite de les racheter. Dwarfs est déjà parvenu à racheter Amco, un vendeur d’articles de cuisine réalisant un chiffre d’affaires de six millions d’euros.
Investir ou vendre
Tôt ou tard, les boutiques en ligne performantes atteignent les limites de leur modèle de démarrage et, au bout de quelques années de croissance rapide, le fondateur doit se demander s’il a les moyens (et l’envie) d’investir massivement dans la prochaine phase de croissance de son entreprise. Si certains sautent le pas, d’autres deviennent les cibles potentielles de Beenakker et de ses homologues du secteur. Ils reprennent l’entreprise et apportent la main-d’œuvre et le savoir-faire nécessaire pour accélérer le changement d’échelle, dans le but de multiplier le chiffre d’affaires par cinq ou dix.
Les places de marché en ligne des grands acteurs du e-commerce connaissent une croissance rapide, souvent au détriment des webshops indépendants. Une évolution logique, selon Marco Coninx, PDG d’Amco, qui énumère les avantages de ces places de marché : elles répondent au souhait des clients de tout trouver sur une seule plateforme, les clients achètent plus souvent sur ces grandes plateformes et les coûts logistiques sont moins élevés. Bien entendu, cela a un coût : les places de marché prélèvent des commissions d’environ 15 %. Toujours selon Coninx, ce coût est compensé par les économies réalisées sur les publicités en ligne pour avoir une boutique en ligne propre.
Une future vague de rachats ?
Faut-il donc s’attendre à une vague de rachats des acteurs européens performants sur les places de marché en ligne ? Si nous transposons le scénario du marché américain ici, nous savons à quoi nous attendre : là-bas, les acheteurs ont déjà levé environ un milliard et demi de dollars de capitaux. Le potentiel est énorme : les vendeurs sur la place de marché d’Amazon représentent aujourd’hui 60 % du chiffre d’affaires de 475 milliards de dollars du géant du commerce électronique, selon les calculs du FD.
En Europe, les montants sont un peu plus modestes pour l’instant : Dwarfs a démarré avec un capital de 7,5 millions d’euros, mais ce n’est qu’une mise en jambe. À cela s’ajouteront bientôt 30 millions d’euros en financement d’endettement par l’intermédiaire d’un capital-risqueur britannique. Avec un tel montant, Beenakker & Co auront de quoi faire. Ils visent des cibles précises : pas les revendeurs de marchandises asiatiques, ou « dropshippers », mais les boutiques en ligne qui ont développé leur propre produit ou marque.
Pour cela, Dwarfs compte deux à quatre fois le bénéfice brut. Beenakker espère ainsi bâtir une entreprise brassant un chiffre d’affaires de 200 à 250 millions d’euros. Dwarfs se présente comme le seul acteur de ce type aux Pays-Bas à l’heure actuelle. Dans le reste de l’Europe, les concurrents se trouvent au Royaume-Uni et en Allemagne. Mais au vu de l’évolution actuelle du marché, il faut s’attendre à voir de nouveaux acteurs émerger.