Un petit creux ? Pois chiches, mille-feuille, straciatella et oignons ne sont que quelques-uns des arômes de cette nouvelle édition de Filet Pur, certes pas 100 % végétale mais bien épicée.
Pourris gâtés
C’est désormais officiel : la fête est finie. Pour de bon. L’effet favorable du virus sur le secteur de la distribution alimentaire n’était que passager. Le secteur a peut-être connu une croissance quatre fois plus rapide qu’en temps normal l’année dernière, mais cela n’arrivera plus, estiment les experts du bureau d’enquête Kantar. De nouveaux défis se profilent, comme celui de rendre le commerce électronique rentable, les acheteurs gâtés s’attendant à une livraison gratuite même pour de petits achats. Pas évident.
Peut-être que quelqu’un devrait l’expliquer à Deborah, la caissière désormais nationalement célèbre du Delhaize de Nieuport-Bains. Encore une pourrie gâtée, si vous voulez mon avis : elle a tout le temps de discuter avec un président de parti lubrique pendant qu’elle est au travail, donc cette charge de travail tombera à pic. Chez Alida, de l’Aldi situé à quelques centaines de mètres de là, ce n’était pas le cas : elle scanne les courses si vite que vous êtes encore en train de remplir vos sacs alors qu’elle attend déjà en trépignant que vous insériez enfin votre carte dans la machine. Conny, du Colruyt voisin, ne se plaint pas ; elle a reçu une part des bénéfices.
Un luxe pour l’élite militante
Tous aux pois chiches, et que ça saute. Pour notre santé et celle de la planète. Ce n’est pas nous qui le disons mais le ministre flamand Zuhal Demir. Actuellement, en moyenne 60 % des protéines que nous consommons proviennent de produits d’origine animale, mais leur empreinte écologique est trop élevée. Le « Green Deal Protein Shift », un nom pas des plus attrayants, entend faire bouger les choses et pas moins de 64 partenaires mettront tout en œuvre pour réaliser les objectifs. Parmi eux, toutes les chaînes de supermarchés. Elles se réjouissent en effet de voir le rayon des produits végétariens se développer : les prix au kilo (et les marges) sont souvent deux ou trois fois supérieurs à ceux de la viande. Specks’kes Fumés du Boucher Végétarien: 33 euros le kilo. Lardons de porc fumés (chez Delhaize) : 11 euros le kilo. Encourageons la transition ! Oui, le véganisme est un luxe pour l’élite militante. Jusqu’à ce que nous commencions à calculer le prix réel de la viande, bien sûr, y compris les dommages environnementaux adjacents.
Les multinationales pensent aussi à notre bien-être : ce n’est pas une coïncidence si Nestlé et Unilever font presque simultanément une offre pour des producteurs de vitamines et de compléments alimentaires sains. La santé est un big business, et plus encore depuis la pandémie. Le fait que nous ayons bu nettement moins de bière l’année dernière est une bonne nouvelle à cet égard, sauf pour les brasseurs, qui constatent un engouement croissant pour les eaux fruitées alcoolisées, que les consommateurs branchés appellent également « hard seltzers ». Allez, plus qu’une semaine et on pourra s’y remettre, non ? Même si la météo ne sera pas favorable à la consommation en terrasse, Carlsberg se réjouit déjà.
Gâtés et débordés
Les prémonitions quant à la fin des supermarchés se sont jusqu’à présent révélées plutôt prématurées, mais si j’étais détaillant alimentaire, je ne dormirais pas sur mes deux oreilles. Les consommateurs gâtés et débordés ont découvert la commodité des box repas, et cette tendance est loin d’être terminée. Simply You Box, le numéro trois sur le marché belge, n’opère plus sous l’égide de Carrefour Belgique mais sous celle du leader français Quitoque et prévoit à nouveau un doublement des ventes cette année. Les concurrents, parmi lesquels pas un seul n’est parvenu à concocter une réponse efficace, sont prévenus.
Et si le supermarché survit, ce sera sans caisse enregistreuse. Du moins si cela n’en tenait qu’à Amazon : la technologie Just Walk Out est désormais prête à être déployée dans les grands magasins. Le personnel ne sert plus qu’au remplissage des rayons, une tâche qui sera bientôt confiée à des robots. Ainsi, le dernier argument en faveur des achats en magasin physique, à savoir un contact social dans ce contexte de distanciation, ne tient plus la route. C’est moi ou il y a vraiment quelque chose qui ne va dans ce modèle commercial ? Jeff pourrait bien le savoir. Les investisseurs allemands croient encore dans le supermarché et ont accordé à Jumbo pas moins de 200 millions d’euros pour poursuivre son extension. Chez nous aussi, donc.
Mille-feuille orange
Nous pouvions déjà voir la tempête à l’horizon lorsque nous avons reçu un e-mail quelque peu mystérieux de Delhaize mardi matin : « Nous changeons de nom, plus d’infos bientôt. » Une blague ? Apparemment non : dans une tentative de reproduire le coup d’éclat de Jupiler (Belgique, vous vous souvenez ?), le détaillant change une lettre de son nom. Bénial ! Non pas en vue du championnat européen de football, mais en hommage à ses 1 600 fournisseurs belges, notamment. Ils ont immédiatement eu la larme à l’œil, vous imaginez bien. Pas vraiment par émotion, mais parce que les récentes négociations annuelles sont encore douloureuses.
Avec un coup d’éclat pareil, vous vous exposez : d’un côté, les applaudissements, de l’autre, les commentaires sarcastiques. Après cette fameuse « fusion entre égaux », Belhaize est en effet aussi hollandais qu’un mille-feuille orange. Les derniers Belges ont depuis longtemps été évincés du comité de gestion et du conseil d’administration par Ahold Delhaize . Hollandaize aurait donc été plus approprié. Et le lancement de la campagne le jour de la Fête du Roi, ça ne peut pas être une coïncidence. D’ailleurs, seuls deux magasins ont une enseigne vraiment adaptée. Et ils ont raté l’occasion d’acheter l’url belhaize.be et d’en faire quelque chose de créatif. Bref….
Straciatella ou dame blanche ?
Elle était disponible, et on ne peut pas en dire autant de toutes les URL. Demandez à Carrefour. Si tout est à vendre à condition d’y mettre le juste prix, cela signifie que pendant plus de vingt ans Carrefour Belgique n’a pas offert le juste prix pour le nom de domaine qui aurait logiquement dû être le sien, à savoir carrefour.be. Celui-ci est resté entre les mains d’une association de résidents francophones de la périphérie bruxelloise pendant des années avant que Carrefour, grâce au rachat de Promodès, devienne (en tout cas pour un temps) le leader du marché belge. Ils ne sont pas dupes, ces champions de la francophonie. Une URL comme celle-là vaut bien le prix qu’un imbécile lui accordera, non ? Enfin, ils sont désormais parvenus à un accord. Ce qui n’est pas sans nous rappeler cet autre petit malin qui possède toujours une URL potentiellement précieuse : le courtier en assurances opérant sur le domaine amazon.be. Mais là encore, monsieur Bezos couldn’t care less, apparemment.
Avec ce nouveau nom de domaine, le détaillant peut désormais annoncer sans retenue ses futurs projets au monde entier. C-Next, par exemple. Cela fait penser à une équipe espoir de 1B, mais non, c’est la vision du Carrefour de demain. Nous l’avons lu dans le rapport d’activité qui est désormais en ligne : l’organisation doit devenir moins hiérarchique et plus inclusive. Sympa, mais plus sympa encore : Carrefour affirme diffuser cette nouvelle culture d’entreprise au sein de l’organisation par le biais de la « méthode Straciatella ». Ce n’est pas une blague, mais une référence aux éclats de chocolat dans la glace italienne. Une approche qui se distingue de la méthode plus classique de la « dame blanche », dans laquelle la couche de chocolat resterait à la surface de l’organisation… Un discours imagé si appétissant de temps en temps, on en redemande.
Et, cerise sur le gâteau : Delhaize a rouvert cette semaine son tout nouveau supermarché à Alost. Un magasin avec un lourd passé, vous savez. L’équipe enthousiaste ne s’est cependant pas laissée abattre, on est Ajuin (« oignon », littéralement) ou on ne l’est pas, et a estimé que l’ouverture méritait bien un clip vidéo typiquement carnavalesque, disons. À la semaine prochaine !
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