Mais l’effet corona se dissipera rapidement, prévoit Kantar. L’année 2020 a sans doute été une année faste pour les supermarchés et les FMCG, mais cette croissance touche à sa fin et de nouveaux défis apparaissent.
Impossible de compenser les fermetures dans l’horeca
Quel sera l’héritage de la pandémie pour le secteur des FMCG ? Le cabinet d’études Kantar brosse un tableau nuancé, qui présente le quadruplement spectaculaire de la croissance mondiale – de 2,5 % à 10 % – moins une tendance que comme un phénomène purement temporaire. Sans les événements sociaux par exemple, les produits de beauté sont passés de la catégorie FMCG qui enregistre la croissance la plus rapide à la seule catégorie à souffrir d’une baisse des ventes.
Les boissons, les produits laitiers et les denrées alimentaires ont enregistré des croissances de 8,6 %, 10,3 % et 11,4 %, mais il est important de noter que ces chiffres ne concernent que la consommation domestique. Si l’on inclut également le canal out-of-home, on constate en effet un recul de 2 à 5 % dans l’alimentation et les boissons – même en excluant l’alcool. Ce qui est logique, puisqu’une boisson coûte en moyenne 1,20 euro à l’extérieur et à peine 0,20 euro quand on la consomme chez soi. Les consommateurs devraient donc boire six fois plus à domicile pour dépenser autant qu’en prenant un verre dans un bar ou ailleurs.
Trois grands gagnants seulement
Le succès n’a pas été non plus total. En fait, on ne recense que trois vrais gagnants : l’e-commerce, les supermarchés et les produits d’hygiène. L’e-commerce a de nouveau été le canal qui a enregistré la plus forte la croissance en 2020 avec un taux de croissance de 45,5 %, deux fois plus rapide qu’en 2019. Sur l’ensemble des marchés, il s’agit même de la plus forte hausse annuelle de part de marché jamais enregistrée. Le commerce en ligne a vu sa part de marché augmenter de 1,6 point et pèse désormais 6,5 % du marché mondial total des FMCG. L’e-commerce électronique a également pris à son compte quelque 23 % de la croissance mondiale.
Mais ce n’est pourtant pas LE grand gagnant : les supermarchés peuvent en effet revendiquer 38 % de la croissance des FMCG. Ils ont ainsi enregistré une croissance de 11,5 % l’an dernier, dix fois plus rapide qu’en 2019. C’est aussi renversement de tendance notable : un an plus tôt, le canal avait perdu 0,5 point de part de marché. Mais cette reprise n’a pas lieu partout : si les consommateurs américains et asiatiques ont trouvé plus pratique de faire leurs courses au supermarché en période de crise sanitaire, les Européens préfèrent de plus en plus les magasins locaux. La part de marché des discounters est également en baisse, notamment en Allemagne et aux Pays-Bas.
Et s’il est vrai que 2020 a été une bonne année pour les marques A, quelques nuances s’imposent à nouveau. Elles ont en effet encore perdu des parts de marché dans la bataille qu’elles livrent marques de distributeur, bien qu’à un rythme plus lent que les années précédentes. Notons toutefois qu’en Europe de l’Ouest, la région où elles sont les plus populaires, la part de marché des marques de distributeurs a stagné puis reculé au second semestre après un bon départ. Sur les deux plus grands marchés – la Grande-Bretagne et l’Allemagne – les marques de distributeur ont perdu respectivement 0,8 % et 0,5 % de parts de marché, en partie à cause de la baisse des ventes des discounters.
L’ère du retail liquide
Comment se présente l’après-coronavirus ? Compte tenu des incertitudes qui persistent – devrons-nous rester confinés ou pourrons-nous reprendre une vie normale ? –, Kantar prévoit un ralentissement de la croissance des FMCG destinés à la consommation domestique ralentira à entre 2,2 % et 5,2 % en 2021. La croissance à deux chiffres de l’année dernière pourrait même ne jamais revenir. « Ce ne sera pas la croissance de 10 % de 2020, mais l’année sera bonne pour l’industrie », dit-on chez Kantar.
L’essor de l’e-commerce est toutefois loin d’être terminé. Même s’il va diminuer cette année, le taux de croissance reste nettement supérieur à celui du marché : si nous restons en confinement, Kantar table même sur une croissance de 38 %. Mais même un assouplissement ne ramènera pas la croissance à moins 28 %. En tout état de cause, les ventes en ligne dépasseront largement les 8 % de parts de marché d’ici la fin 2021. En effet, 45 % des consommateurs affirment qu’ils continueront à acheter sur Internet.
Même si cela constitue un défi en soi : en Europe surtout, il est important de fidéliser davantage les clients et de continuer à servir – de manière rentable – ceux dont le panier est moins rempli. En effet, les consommateurs continueront à attendre des livraisons gratuites, tout en passant des commandes plus fréquentes, mais plus petites. En outre, on constatera que si l’e-commerce se démocratise et touche désormais toutes les catégories de la population, il reste particulièrement populaire dans les grandes villes.
Le FMCG entre dans l’ère du retail « liquide » ou hybride, où les frontières entre consommation à domicile, consommation out-of-home, e-commerce et livraison à domicile sont de plus en plus floues. Pour reprendre les termes des auteurs de l’étude « Les entreprises de livraison à domicile comme Uber Eats et Deliveroo s’aventurent désormais dans la livraison de produits alimentaires, l’e-commerce a enregistré une croissance deux fois plus rapide que les années précédentes, et les retailles physiques ont réinventé leur assortiment en mettant l’accent sur l’omnicanal. »