C’est déjà le dernier Filet Pur d’une année peu réjouissante, et votre chroniqueur favori y révèle la seule véritable raison pour laquelle le leader de la grande distribution s’est pris les pieds dans le tapis. Entre autres choses. Bonne dégustation !
Le plan du Père Noël
La quarantaine d’employés de la division lait en poudre de FrieslandCampina à Aalter peuvent dormir sur leurs deux oreilles : ils conserveront leur emploi. Même si leur employeur va poursuivre ses grandes soldes de fin d’année qui ont déjà coûté leur job à 211 collègues à Genk la semaine dernière. Car c’est bien une vague de restructurations qui déferle sur secteur des FMCG, et même les marques les plus robustes n’y échappent pas : chez Coca-Cola, le Père Noël apportera un plan d’assainissement qui doit réduire le nombre de marques de moitié et mettra la moitié des collègues belges à la rue. Magnanime, la société va investir massivement dans la commercialisation de hard seltzer, une boisson alcoolisée, mais peu calorique. Histoire de leur permettre de noyer leur chagrin. Maigre consolation.
La semaine dernière, une caissière anonyme a également perdu son emploi : elle aurait été licenciée sur-le-champ après avoir demandé à un client de porter correctement son masque. Nous ne connaissons pas tous les tenants et aboutissants : le syndicat qui a levé le lièvre refuse de divulguer le nom du magasin, et nous n’avons donc pas pu demander de réaction. Mais sur notre page Facebook, des employés des magasins se plaignent souvent du comportement des clients, et le moins que les enseignes puissent faire est de se ranger de temps en temps du côté de leurs collaborateurs pris pour cible. Le client n’a pas toujours raison, contrairement à ce qu’il pense souvent. Pour eux, Carrefour facilite encore la critique : pour peu qu’ils scannent un code QR, leurs griefs aboutiront directement dans la boîte aux lettres du directeur du magasin, qui ne peut plus se cacher.
Pour les accros du canapé
Ceux qui n’ont pas envie d’aller au supermarché en ces temps de pandémie n’ont plus besoin de se lever de leur fauteuil. Ils peuvent par exemple se faire livrer leurs courses par un voisin bienveillant – du moins s’ils habitent près de Mons et commandent leurs achats au Cora local. L’hypermarché est le premier partenaire belge de Shopopop, la plateforme française de crowdshipping qui a l’ambition de conquérir le reste du pays.
Une autre option consiste à se faire livrer des aliments sains à domicile : le webshop bio Kazidomi grandit à vue d’œil – les bienfaits des engrais naturels sans doute – et veut s’attaquer d’urgence au marché néerlandophone. À cet effet, ils viennent de lever six millions d’euros auprès d’une flopée de nouveaux investisseurs. Ils ont déjà conquis la France. Grâce au virus, leur chiffre d’affaires a été multiplié par trois. Mais ne désespérez pas si vous préférez la malbouffe : Happi, un nouveau concept de box à snacks propose des en-cas et des boissons à volonté aux accros du canapé et de Netflix. D’abord en Métropole, puis en province. Pour les amateurs de vin enfin, il y a les boutiques en ligne Bourseduvin.be et LeonColaris.be : 80% de croissance des ventes cette année et des dents qui raient le parquet.
58 à 8
Mais ceux qui aiment aller au supermarché aussi ont encore plus de choix : les enseignes de supermarchés ne sont pas restées les bras croisés cette semaine. Le Colruyt d’Alsemberg, par exemple, a un nouveau concurrent : le premier Ekoplaza, la chaîne de supermarchés néerlandaise qui va rhabiller à ses couleurs les seize établissements Origin’O de Belgique, a ouvert au coin de la rue. Difficile de juger de leur capacité à se poser en rival de Bio-Planet sur la base des photos qui nous sont parvenues : ils n’avaient manifestement pas le budget pour engager un bon photographe.
Aldi a procédé à sept ouvertures en une seule journée ce mercredi. Ou plutôt réouvertures. Et c’était d’ailleurs une coïncidence, ont-ils admis. La faute au coronavirus qui a retardé certains chantiers. Les Hollandais aussi ont fait parler d’eux : Albert Heijn et Jumbo ont tous deux ouvert un nouvel établissement – le dernier de l’année – le même jour. Le score est désormais de 58 à 8, mais Bébert a neuf ans d’avance. L’objectif n’a pas changé : premier à cent. Que Frits van Eerd ne se laisse pas trop distraire par ce gros achat de Noël qu’il a réalisé juste avant les fêtes.
Attrape-hipsters
Mais la grande nouvelle de la semaine dernière figurait bien sûr dans le communiqué tombé dans notre boîte mail mardi soir après la fermeture de la Bourse : le Roi vacille sur son trône. Mes aïeux, quelle misère ! Colruyt s’est donc pris les pieds dans le tapis. Qui l’eût cru ? Que se passe-t-il à Halle ? Bien sûr, eux-mêmes invoquent avant tout la propension temporaire du consommateur à faire ses courses chez des commerçants locaux en période de corona. Et affirment que tout va rentrer dans l’ordre. Mais notre analyste a dégainé : « c’est ce qui arrive quand on est un suiveur ». Eh bé ! S’attaquer à Jef, il faut oser.
Comme souvent, c’est à Filet Pur de révéler la véritable raison des pertes de parts de marché. Il fallait bien que quelqu’un s’y colle. Parce qu’au fond – et on n’entend jamais les grands médias à ce sujet –, tout est la faute de Yotam Ottolenghi. En effet : où trouver les ingrédients exotiques de tous ces plats de Noël sexy ? OK, Jef – après mûre réflexion – a fini par admettre les pois chiches et les avocats dans ses magasins, mais pas question d’aller plus loin. La harissa à la rose, le sumac, le za’atar ou les flocons de chipotlechilli, c’est de l’attrape-hipsters. Qu’ils aillent donc chez Cru. Pas question non plus de vendre des sushis : pure escroquerie. Du riz prétentieux. Un vrai Colruyt se contente d’un bon sandwich. Au beurre de ferme et jambon Magistral. Et peut-être une pointe de moutarde. Pas vrai ? On en voit le résultat.
Quant aux gourmandises irrésistibles que va préparer votre crâneur favori la semaine prochaine pour le réveillon de Noël et l’endroit il va dénicher ses ingrédients : ce ne sont pas vos affaires. Je ne veux rendre personne jaloux. En revanche, vous pouvez savoir que je suis sur le point de déboucher une bonne bouteille de Viognier pour célébrer le début des vacances de Noël. Je reviens dans deux semaines. En attendant, vous aurez tout le temps de jeter un coup d’œil dans le rétroviseur grâce à la grande rétrospective annuelle du foodretail de RetailDetail. Bonnes fêtes, mais prenez soin de vous. À l’année prochaine!
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