Les Belges font de plus en plus d’achats depuis leur smartphone : ils préfèrent les applications et les plateformes locales. Les commerçants locaux sont-ils prêts ? « Les gens ne continuent pas à acheter localement par pitié. »
Alimentation et bricolage
12 % de la population a effectué son premier achat en ligne pendant le confinement et, même après le confinement, la fréquence des achats en ligne reste nettement plus élevée qu’auparavant. La crise du coronavirus a donc renforcé les tendances dominantes du commerce électronique, rapporte le « Rapport sur l’e-shopper belge », au travers duquel Why5Research, à la demande de Safeshops.be, étudie le comportement d’achat en ligne des Belges.
« Le secteur du bricolage, par exemple, a vu ses ventes en ligne quadrupler, et elles restent encore deux fois plus élevées qu’auparavant », explique Greet Dekocker, directrice de Safeshops. « Certains acteurs du secteur de la mode compensent presque entièrement la perte de chiffre d’affaires en magasins par le commerce électronique. » La mode, les chaussures et les services tels que la vente de billets et de voyages sont traditionnellement les principales catégories, devançant l’alimentation, mais après le coronavirus, c’est le secteur alimentaire qui a enregistré l’une des plus fortes croissances. L’électroménager a également explosé.
Préférence aux applications
45 % des répondants ont indiqué qu’ils utilisent leur smartphone pour faire des achats en ligne. L’utilisation de l’ordinateur a diminué de 10 % par rapport à l’année dernière. « Nous serons bientôt à un tournant », pense Dekocker. « D’ici un an ou deux, le smartphone sera devenu prépondérant. » Une donnée importante pour les détaillants : beaucoup d’entre eux hésitent à créer une application. « Si la part des achats effectués depuis les téléphones portables continue à augmenter, les applications deviendront également plus importantes. Le consommateur apprécie leur facilité d’utilisation. »
47 % préfèrent une application à un site web. Réaliser des achats sur une application est en effet plus facile et plus rapide, vous ne devez pas systématiquement vous connecter ou entrer les données de paiement. Les grands acteurs y travaillent déjà activement et les consommateurs s’y habituent rapidement. En tant que boutique en ligne, il faut en tenir compte. »
Paiement simple
Aujourd’hui, les consommateurs ont davantage confiance dans la livraison des produits : leur principale préoccupation est que les articles arrivent en bon état. La livraison à domicile reste l’option préférentielle, et cette tendance a été renforcée pendant le confinement : en effet, nous étions plus nombreux à travailler à domicile. Cependant, les points de ramassage et les distributeurs automatiques de colis sont également devenus plus populaires. La possibilité de venir y retirer ses commandes sans contact a été un facteur déterminant.
À noter : pour la première fois, Paypal est devenu le mode de paiement préféré des consommateurs, pour des raisons de convivialité et de sécurité. Toutes les boutiques en ligne ne proposent pas cette option actuellement, peut-être à cause du coût assez élevé de la transaction. « Le paiement peut constituer un obstacle important aux achats en ligne, notamment si le mode de paiement n’est pas clairement indiqué ou si trop de données sont demandées. Le paiement doit être une opération fluide. »
Local, numérique, durable
Pendant le confinement, il est apparu clairement que les consommateurs avaient une préférence pour les achats locaux. « Nous nous demandons combien de temps cela va durer. Nous avons dégagé six facteurs qui encouragent les consommateurs à acheter localement : l’hygiène, la santé, la durabilité, l’implication sociale, le contrôle et la commodité. Si les arguments relatifs à l’hygiène et à la santé motivés par le coronavirus tendront à quelque peu diminuer avec le temps, les autres facteurs se renforceront. Mais toutes les boutiques en ligne locales n’offrent pas la même facilité d’utilisation que bol.com, par exemple, et les gens ne continuent pas à acheter localement par pitié. »
Les consommateurs sont plus favorables aux marchés locaux : Amazon, Aliexpress et Whish doivent céder du terrain, tandis que bol.com parvient à se positionner comme un acteur local et inspire donc davantage confiance. Parmi les plateformes d’articles d’occasion, 2dehands.be obtient de meilleurs résultats (60 %) en matière de confiance et d’expérience qu’eBay (40 %) et Facebook Marketplace (37 %). Le nouveau venu, Vinted.be, s’est d’emblée fait remarquer : il s’est immédiatement hissé à la quatrième place avec 35 %, juste derrière Facebook Marketplace.
Shopping social et code QR
Au final, il ne s’agit pas d’une bataille entre le commerce électronique et le magasin physique, souligne Greet Dekocker. Ces deux concepts doivent coexister. La révolution numérique génère de nouvelles menaces pour les commerçants belges : « Pensez à l’essor des boutiques in-app, comme les boutons “Acheter maintenant” sur TikTok et Instagram, ou aux évolutions de jeux tels que Fortnite. Il faut tenir ces plateformes à l’œil. Les consommateurs s’habituent de plus en plus au shopping social, à l’oral, au chat… »
Le code QR est également un grand gagnant. Son utilisation s’est rapidement imposée, notamment grâce à la recherche de contacts et au système de commandes dans les restaurants. Cela ouvre de nouvelles perspectives : pensez à un code QR sur un vêtement qui peut afficher instantanément en ligne des articles assortis ou des modèles dans d’autres couleurs.
Opportunités et menaces
La durabilité offre des opportunités de se différencier. 48 % des acheteurs valorisent cet aspect, mais ils peuvent difficilement citer des boutiques en ligne qui intègrent vraiment la durabilité à leur identité. « Et lorsque nous leur demandons ce qu’ils estiment n’être pas durable, les consommateurs mentionnent l’emballage : ils n’apprécient pas que les boutiques en ligne utilisent des emballages surdimensionnés, qu’elles ne groupent pas les commandes, qu’elles utilisent trop de plastique… » L’emballage est donc beaucoup plus important pour le consommateur que l’utilisation de vélos électriques ou le paiement d’une compensation pour l’empreinte carbone.
Conclusions ? « Gardez les plateformes à l’œil. Seul un commerçant belge sur dix est actif sur une plateforme commerciale. Il y a 27.000 commerçants actifs sur bol.com, dont 3.000 Belges. Le consommateur y voit donc essentiellement une offre étrangère. Nous devons prendre le train en marche. Il y aura davantage de plateformes commerciales : de plus en plus de grands détaillants y pensent, Ikea par exemple. Dans cette économie de plateforme, nous assistons à une bataille entre les plateformes locales et internationales. Cette lutte ainsi que la percée du shopping mobile et l’importance de la durabilité sont trois tendances qui représentent tant des menaces que des opportunités de se démarquer. »