Alors que vous pensiez que ça ne pourrait pas être pire, votre rubrique préférée vous prouve le contraire. Comment Colruyt appuie là où ça fait mal, pourquoi Makro est maudit, qu’est-ce que Delhaize a concocté avec le Conseil national de sécurité et qui harcèle Duvel? Filet Pur vous le révèle en exclusivité !
Retour à l’essentiel
On les reconnaît instantanément, ces vendeurs des magasins de nuit qui, poussant leurs énormes chariots plats, naviguent négligemment dans le magasin sans aucun respect pour les flèches pourtant bien visibles sur le sol. Ils viennent chercher des quantités indécentes de boissons gazeuses, de bière et de chips et ne peuvent pas s’empêcher de faire perdre le temps précieux des clients et du personnel de caisse à coup de discussions absurdes sur leur facture. Peut-être, mais c’est un gros peut-être, que cette calamité sera bientôt de l’histoire ancienne et que ces sources de contrariété seront désormais reléguées à un endroit à part, où le commun des mortels ne sera pas le bienvenu, faute d’avoir cette carte Colruyt Professional Plus tant convoitée. À Schaerbeek, ce sera bientôt le cas.
Pourquoi « carte Plus » et pas « carte Xtra » ? Jef le sait peut-être, mais l’essentiel de la communication du plus grand groupe de vente au détail du pays était on ne peut plus claire : « À partir de maintenant, nous allons rendre les choses encore plus difficiles pour Makro, Sligro, Soco & co qu’elles ne l’ont jamais été. Parce que nous pouvons le faire, tout simplement. » Avec une gamme de seulement 2500 articles populaires au prix le plus bas, Colruyt Professionals se montre sélectif. Appuyer là où ça fait mal, comme on dit. Pour le détaillant, le commerce de gros est loin d’être une nouvelle discipline : au contraire, il est l’origine et l’essence du groupe. Donc, retour aux racines, retour à l’essentiel. Rien de plus typique pour Colruyt.
Un puits sans fond
Et ça fera mal, sans aucun doute. Les résultats financiers publiés par Metro et Makro la semaine dernière laissent peu de place à l’interprétation : c’est la misère. Même si le PDG, Vincent Nolf, avait clairement indiqué l’automne dernier que la baisse du chiffre d’affaires s’était plus ou moins arrêtée, la perte d’exploitation de 65 millions d’euros est encore lourde. De l’argent que la société mère aurait certainement préféré utiliser autrement, plutôt que de le jeter dans un puits sans fond.
En d’autres termes, qu’un nouveau concurrent augmente maintenant la pression sur les prix tombe plutôt mal. Mais ils n’ont même pas le temps d’y penser pour l’instant : le secteur de l’horeca est en train de rouvrir, et tout le monde est sur le pont dans les magasins cash & carry. Mais pour l’instant, il ne fait pas un temps à se poser en terrasse. Il ne manquait que ça. Eh bien, comme le légèrement génial Bill Watterson le résume avec justesse dans cet épisode de Calvin & Hobbes : « C’est l’une des choses remarquables de la vie. Ça ne va jamais assez mal pour que ça ne puisse pas être pire. »
Néologisme de l’année
Rattrapage de la semaine : un trophée décerné à l’unanimité par le jury indépendant à Delhaize, qui ouvre enfin le robinet des promotions, car nous avons beaucoup à rattraper après ces semaines de misère. Le timing est primordial : cette annonce ressemblait étrangement à un un-deux avec le Conseil national de sécurité. Marc Van Ranst travaille-t-il en tant que consultant en commerce de détail ? Xavier Piesvaux est-il en possession du numéro de GSM d’Erika Vlieghe ? Nous n’insinuons rien, nous ne faisons que poser des questions.
Promotions de rattrapage donc : également candidat pour le prix du néologisme de l’année. Certes, un barbecue de rattrapage n’est pas au programme ce week-end à cause de la pluie. Quid d’un apéritif de rattrapage ? Hé, il faut se débarrasser au plus vite de ces corona-kilos maintenant que la réouverture des plages se concrétise. Mais Delhaize y a pensé : si vous achetez des produits sains, vous êtes remboursé. De 5% , tout de même. À Zellik, ils ont commodément revendiqué le Nutri-Score comme leur instrument marketing exclusif : chapeau ! Laissons les scientifiques émettre des critiques acides sur cette étiquette dite « simpliste » : elle a déjà largement démontré son utilité économique. Voilà.
Pas si incroyable
On sait que ces vrais faux hamburgers de Garden Gourmet sont impossibles à distinguer de vrais abats. Le propriétaire Nestlé a raison de les saupoudrer de toutes sortes de superlatifs, mais il y a désormais une chose qu’il ne peut plus prétendre : que ce burger est incroyable. Car il ne l’est pas. Ou du moins, pas selon le tribunal : à la demande du concurrent américain Impossible Foods, le nom Incredible est réservé à l’entreprise qui propose des substituts végétaux, car il ressemblerait un peu trop à Impossible. Et Impossible veut venir en Europe. Donc…
1-0 pour les Américains. Non pas que les Suisses se contentent de l’accepter : ils vont en appel, mais doivent entre-temps renommer leur pièce maîtresse pour éviter de lourdes sanctions. Après une réunion virtuelle de brainstorming, ils ont choisi à l’unanimité l’alternative peu originale « Sensational ». Bon…. Supercalifragilisticexpialidocious était sans doute trop long pour l’étiquette.
Bande de zwan
Cerise sur le gâteau, en France, ils pourraient bientôt devoir adapter la deuxième partie de cette appellation : là-bas, la respectable Assemblée Nationale, qui n’est composée que d’éminents spécialistes de l’alimentation, vous n’en doutiez pas, a décidé qu’on ne peut plus utiliser de dénominations animales pour les produits végétaux. Fini, le steak ou le hamburger aux légumes ? Bien entendu, l’introduction de cette mesure bien réfléchie va immédiatement ramener la consommation de viande en perte de vitesse à des niveaux sans précédent. Bande de zwan non-végétales.
Et ce n’est pas tout : on apprend par Duvel Moortgat qu’une haute teneur en alcool n’offre aucune protection contre le coronavirus. Après une année record de pas moins d’un demi-milliard d’euros, c’est la catastrophe depuis l’apparition de ce satané virus. Même dans leur bulle, les gens ne se réfugient plus dans la picole. Il n’y a plus de certitudes. Où va le monde ? De plus, ce n’est que le début des problèmes pour le brasseur. Lisez la suite et tremblez !
Les voies du diable
Car qu’est-ce qu’a déposé le facteur à ma porte d’entrée hier ? Une boîte. Il était écrit « Fragile ». Expéditeur : Brouwerijplein 1 à Louvain. Vous savez ce qu’il en est : Gigabrew a élaboré un nouveau breuvage. Et pas une petite bière insipide non alcoolisée pour changer. Non, une blonde puissante à 8,5% d’alcool. Vous comprenez maintenant ? La nouvelle bière s’appelle Victoria et l’étiquette arbore l’archange Saint Michel. Ce n’est pas une coïncidence : après tout, c’est l’ennemi du diable, selon le communiqué de presse. Vraiment. Plus encore : le symbole de la victoire du bien sur le mal, sur « le faux et l’artificiel, caractéristiques des voies du diable. » Je cite littéralement.
Pas besoin de faire un dessin, n’est-ce pas ? AB InBev ne se donne pas la peine de masquer son attaque frontale contre le fleuron peut-être le plus emblématique de notre culture de la bière belge. Et il agit sous l’égide de la plus ancienne marque de bière du Mexique. Sans blague. Culoté. J’imagine que les responsables marketing à Louvain s’en sont bien amusés.
Pression sur mes épaules
A-t-on affaire à un tueur de diable ? Hmmm… Il faudra attendre un peu pour avoir un avis objectif sur le nouveau produit. J’aurais aimé organiser une petite dégustation pour connaître le verdict de notre Captain of Retail, un connaisseur de Duvel pure souche, un expert en bière blonde forte qui ne connaît pas son égal dans l’hémisphère occidental. Malheureusement, c’est impossible : le pauvre homme n’a pas bu une goutte depuis des mois pour repartir plus frais que jamais, dès que ce sera totalement autorisé. Attention !
Ainsi, c’est sur mes seules épaules que repose une lourde tâche, que je vais essayer d’accomplir au mieux ce soir. Nous n’avons pas le choix : quelqu’un doit le faire. Soyez prudents et à la semaine prochaine !
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