Comment élever l’absurdité au rang d’art conceptuel? Il suffit de le demander à nos sympathiques voisins hollandais. Voici le résumé hebdomadaire totalement indigne d’Instagram de RetailDetail Food!
Des fuites organisées
Une fois de plus Jumbo a fait la une de l’actualité. L’enseigne hollandaise bénéficie carrément d’une année complète de publicité gratuite avant même d’avoir mis un pied dans notre pays. Les médias lui déroule le tapis rouge, comme ils l’ont fait pour Albert Heijn par le passé. Croyez-moi, finalement le problème de notoriété ne se posera plus. Et en plus ils n’ont même pas besoin de communications officielles, tout se sait par fuites accidentelles. Soi-disant. Demandez plutôt à Jef Colruyt ce qu’il advient lorsqu’une chaîne belge s’aventure sur le territoire hollandais.
Mais quelle était donc cette grande nouvelle? Jumbo va exporter son fameux concept ‘Foodmarkt’ dans notre pays. C’est ce qu’a dévoilé ‘par hasard’ le CEO Frits van Eerd lors d’une réunion d’entrepreneurs. Mais nous savons tous que le hasard n’existe pas, tandis que les complots oui. Précisons que Foodmarkt est une formule branchée qui combine le concept d’un simple supermarché avec des éléments horeca, avec notamment des comptoirs-traiteurs proposant des repas chauds à emporter et un restaurant pour une consommation sur place. Bref, une formule qui n’existe pas encore vraiment chez nous. Seul le concept haut de gamme, mais relativement traditionnel Delitraiteur s’en approche quelque peu. Ce dernier lance d’ailleurs un concept horeca plus compact, baptisé Eat & Go, avec au menu des salades, potages, wraps et sandwiches.
Une petite bombe
Ce concept Foodmarkt a-t-il ses chances en Belgique ? Très probablement. De plus, depuis que Jumbo a repris la chaîne de restauration La Place (un genre de Lunch Garden, mais pour les moins de 80 ans), l’enseigne dispose du savoir-faire nécessaire pour nous concocter des plats décents. Imaginez que le retailer hollandais arrive chez nous avec un concept innovant, combinant la partie marché de son Foodmarkt avec un supermarché de proximité compact et un assortiment online à prix alléchants, à retirer en magasin ou livrable à domicile. Cela pourrait faire l’effet d’une petite bombe, non ?
Cela pourrait en même temps rassurer le management hyper nerveux de Colruyt ? Car si le péril jaune à l’intention de jouer les restaurateurs chez nous, sa garantie du meilleur prix passera peut-être au second plan. Et là c’est surtout Delhaize qui a de quoi s’inquiéter? Pensiez-vous peut-être que l’enseigne au lion a entamé par hasard le déploiement de snackbars instore en collaboration avec Foodmaker? Non, le hasard est souvent trop fortuit pour être un hasard.
De la poudre aux yeux
Mais le patron de l’entreprise familiale de Veghel a également révélé autre chose : « Si ça ne marche pas en Belgique, nous repartirons aussitôt », a-t-il déclaré. Holà. Douterait-il déjà ? Emettrait-il déjà des réserves ? Prévoit-il une échappotoire pour battre rapidement en retraite? Non, cela ne ressemble en rien à la mentalité hollandaise. Ou alors le filou nous jette-t-il de la poudre aux yeux? C’est bien connu : si par hasard un Hollandais ne tente de vous escroquer, ce qu’il a oublié, tout simplement.
Ceci dit, l’expansion internationale n’est pas une garantie de réussite. Voyez par exemple l’enseigne de surgelés Picard, qui connaît un grand succès sur son marché domestique, mais ne parvient pas à décoler chez nous. La chaîne a déjà renoncé à la Flandre depuis un bon moment et les magasins dans la partie franchophone du pays restent déficitaires. Cinq augmentations de capital en six ans, faut le faire. Mais que voulez-vous, la stratégie commercial se résume en quelques mots : ‘petites portions à prix élevés’.
Alerte au smog
Et ces mêmes magasins risquent de plonger encore plus profondément dans le rouge à en croire les prévisions de Comeos : la fédération du commerce met en garde contre l’impact désastreux que pourrait avoir le fameux plan de délestage qui privera des zones entières d’électricité. Avec pour conséquence du poisson pourri, des bâtonnets glacés fondus, des salades flétries, … et ainsi de suite. En effet : si cet hiver les centres de distribution et les magasins sont coupés d’électricité, des tonnes d’aliments frais et surgelés seront bons à jeter à la poubelle. Le marché des générateurs de secours tourne déjà à plein régime. Préparons-nous à une alerte au smog d’ici peu. Avec nos remerciements à nos gouvernements de ces vingt dernières années.
Les médias sont toujours à l’affût de mauvaises nouvelles. Ainsi cette semaine ils se sont empressés de mettre en exergue un préavis de grève chez Delhaize. Par contre pas un mot sur la réunion de conciliation où Delhaize a servi du délicieux café Ciao Italia avec de croustillants biscuits dentelles de Tast of Inspirations. Le différend porte sur la flexibilisation du personnel en magasin : les employés ont trop de travail et trop peu de temps, disent-ils. Tout comme nous. Peut-être Delhaize pourrait-il solutionner ce problème en supprimant complètement les caisses, ce serait déjà un souci en moins. Cela vous paraît asbsurde ? Pas tant que ça. Vu l’arrivée imminente d’Amazon Go à Londres et l’ouverture récente d’un Auchan digital à Paris et de AH to go sans caisse à Amsterdam, il serait plutôt absurde de voir encore des caisses dans le tout nouveau concept Shop&Go que présentera le retailer d’ici peu. Nous sommes impatients !
Un échantillon de salive
Mais revenons aux Pays-Bas. Cette semaine les Hollandais se sont à nouveau vu décerner le prix ‘Arnaques et escroqueries’ de RetailDetail. Bilder & De Clercq, une start-up d’Amsterdam, qui d’abord a ouvert des magasins-repas physiques, pour ensuite les fermer et finalement vendre des box repas en ligne, a imaginé une nouveauté : la Foodox ADN. Le concept ? Vous envoyez un échantillon de salive à l’entreprise, qui ensuite vous livrera des repas dont les recettes sont personnalisées en fonction de votre ADN. Vraiment ! Vous le savez : Filet Pur dit toujours la vérité, rien que la vérité.
Mais soyons sérieux. N’importe quel nutritionniste vous dira qu’il s’agit là de foutaises pseudo-scientifiques. Oui, la personnalisation est une tendance future dans l’alimentaire, ce qui a d’ailleurs été confirmé lors de notre incomparable Foodcongress. Mais nous n’en sommes pas encore là. Pour l’instant ces recettes génétiquement adaptées relèvent encore de la science fiction. Mais admettons l’idée a été bien amenée. C’est qu’on appelle du marketing. Sinon comment parvenir à convaincre un Hollandais de débourser 100 euros par mois en échange de quelques maigres portions de légumes et de poulet? Nous les soupçonnons de livrer la même boîte à tout le monde. Ils en seraient bien capables, ces filous.
Alerte Instagram
Et enfin ceci. Des murs en briques authentiques? Check! Des cageots de fruits en bois rustique? Check! Du mobilier disparate d’un magasin de seconde main? Check! Des sacs en jute? Check! Le rêve du hipster. L’Act for Food Factory’ de Carrefour a tout pour plaire sur Instagram. Quant à savoir si l’ambition de cette initiative va plus loin que quelques centaines likes, c’est un point d’interrogation. Le lieu d’approvisionnement de ce pop-up aussi est une énigme, sachant qu’il y a une pénurie d’agriculteurs bios tandis que la demande de produits bios dépasse l’offre. Et cela ne fera qu’empirer si Carrefour déclenche une guerre du bio, car dans ce cas aucun agriculteur ne voudra encore passer au bio. Du moins c’est ce que prétendent les concurernts. Par jalousie, sans doute.
L’initiateur de ce pop-up branché est le directeur innovation Arnaud Lesnes. Il a un job en or, le chançard : imaginer des projets plus fous les uns que les autres et ils n’ont même pas besoin d’être rentables. Bref, un peu comme la rédaction de RetailDetail. A la semaine prochaine!
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