Les robots réduisent les coûts et améliorent l’expérience client. Carrefour, Mediamarkt et Sephora les utilisent déjà. Mais sont-ils aussi intéressants pour vous ? Si vous vendez des produits électroniques ou de bricolage, la réponse est oui.
Réduction des coûts
Sachant que les ventes en ligne vont doubler dans les dix prochaines années pour atteindre 20 à 25 % du chiffre d’affaires du retail, il paraît évident que les magasins physiques ne peuvent plus se contenter d’un rôle purement transactionnel. Les détaillants se retrouvent dès lors confrontés à un paradoxe : ils doivent d’une part réduire leurs frais opérationnels par nécessité économique et, d’autre part, investir dans l’expérience de marque et de shopping. Une étude récente de Roland Berger explique le rôle que les robots pourraient jouer dans la réussite de ce périlleux exercice d’équilibriste.
Pour commencer, un robot revient d’ores et déjà moins cher que le salaire annuel d’un employé de magasin, et leur coût ne cesse de diminuer. Les robots constituent donc clairement une option concurrentielle. Mais quel rôle peuvent-ils jouer dans les environnements retail ? Les robots sont en capables d’assumer une grande diversité de tâches. Certaines n’ont qu’une valeur ajoutée limitée pour le client, mais sont réalisées sans erreur et à bas prix. Des tâches routinières comme la préparation des commandes par exemple. Mais les robots peuvent aussi apporter une nouvelle dimension à l’expérience client. Ils peuvent également faciliter les procédures en magasin, collecter des données et offrir de nouveaux outils d’analyse. Il existe même des algorithmes capables de reconnaître les émotions humaines. Roland Berger distingue quatre grands domaines d’application.
Front-office et back-office
Le premier est la gestion de marchandise : les robots peuvent efficacement contrôler, inventariser et reconstituer les stocks en linéaires et dans l’entrepôt. L’exemple le plus connu est Tally, un robot qui arpente en toute autonomie les rayons des magasins afin notamment d’identifier les produits en rupture et de contrôler les plans de rayonnage. Un autre exemple est Scallog, un robot français qui peut être mis en œuvre dans les drives en vue de la préparation des commandes passées en ligne. Ces robots optimisent les opérations logistiques et les frais d’inventaire. Ils sont beaucoup plus efficaces et économiques que les humains, mais sont essentiellement actifs au niveau du back-office.
Ce n’est pas le cas de robots tels que Pepper, Nao ou Tiki : ceux-ci sont à même de saluer et de divertir les clients, de communiquer des informations produit ou de renseigner les promotions. Ils peuvent aussi être utilisés dans le cadre d’applications de réalité virtuelle augmentée. Ils sont polyglottes et très accessibles grâce à leur physionomie engageante. Lors d’un test effectué avec Pepper, Carrefour a constaté que le nombre d’interactions avec le robot était trente fois plus élevé qu’avec les bornes digitales. Les magasins qui déploient Pepper voient le trafic augmenter de 10 % à 30 %. Un robot reste une attraction. Pour en faire l’expérience, rendez-vous par exemple chez Mediamarkt à Wilrijk ou dans notre propre Home of Retail (petit conseil : réservez une visite guidée).
Caractéristiques humaines
Les robots sont aussi très doués pour apporter les produits, exécuter des paiements automatiques, gérer des files d’attente virtuelles… Pensez aux drones et au robot roulant Starship récemment testé par Metro et Tesco, mais aussi à Hointer, la boutique de jeans robotisée à Seattle. Les robots amènent les articles choisis par le client jusqu’à la cabine d’essayage. Résultat ? Le magasin a réduit ses frais de personnel de moitié, il peut se contenter d’une surface de vente cinq fois plus petite, et les clients essaient trois fois plus de vêtements.
Best Buy a testé Chloé, un bras articulé qui n’a certes pas grand-chose d’humain, mais qui est capable d’extraire du rayon les CD, DVD et jeux que vous choisissez sur un écran tactile à la vitesse de l’éclair. L’initiative n’a toutefois pas été couronnée de succès, le concept n’ayant pas réussi à séduire les clients. Sans doute parce qu’il ne s’agissait pas d’un robot humanoïde. Attention cependant : même s’il est préférable que les robots soient dotés de certains traits humains sympathiques, ils ne doivent pas trop nous ressembler sous peine de devenir monstrueux.
Analyse du parcours client
Le dernier domaine, et aussi le plus innovant, est ce que Roland Berger appelle l’analyse du parcours client. Les robots sont en mesure de compter le nombre de clients, de cartographier les trajets suivis par les clients, d’analyser les taux de conversion et même d’interpréter les comportements et les émotions. Les retailers peuvent ainsi enfin procéder dans les magasins physiques aux mêmes analyses que les webshops le font depuis des années. Ce ne sont pas les exemples qui manquent. Retailnext recourt à la robotisation pour mener des analyses instore approfondies. La start-up française Digeiz utilise cette technique pour analyser le parcours client en magasin.
Avouons-le tout de même, la capacité des capteurs à analyser nos sentiments est quelque peu dérangeante. Le client qui entre dans un magasin affiche un large spectre d’émotions à la vue des produits, des promotions et de la théâtralisation du magasin. Ces émotions sont ‘trahies’ par des micro-expressions, c’est-à-dire des mouvements involontaires et quasi imperceptibles des muscles du visage. Les capteurs robotiques sont de mieux en mieux à même de reconnaître ces émotions et de les relier aux individus. Emovu, de la société américaine Eyeris, analyse les émotions dans le but de proposer des produits et expériences plus pertinents aux clients. Bon nombre de consommateurs soucieux de préserver leur vie privée se méfient toutefois de ce genre d’applications.
Magasins d’électronique et de bricolage
Tous les détaillants n’ont pas le même intérêt à déployer des robots. Roland Berger se base sur cinq critères. Les robots informatifs ont davantage leur place dans de grands magasins proposant un large assortiment que dans de petits magasins à l’offre restreinte. Ils conviennent mieux aux magasins misant surtout sur le libre-service, et où les conseils sur mesure de collaborateurs qualifiés ne sont pas indispensables. Ils s’avèrent particulièrement utiles dans les catégories de produits complexes. Les robots semblent en revanche moins adaptés aux univers de produits de luxe, où les clients nourrissent des attentes élevées à l’égard du personnel. Ils n’ont pas non plus vraiment leur place chez les discounters. Ils ont par contre certainement un rôle à jouer dans le domaine des produits requérant travail sur mesure ou personnalisation.
Bref, si vous proposez un large assortiment de produits complexes en libre-service, si vous vous positionnez dans le milieu de gamme et si vous offrez un service personnalisé, les robots sont faits pour vous. Les secteurs répondant le mieux à ce profil sont l’électronique et le bricolage. À San José en Californie, un magasin de bricolage compte sur le robot OSHbot pour conseiller ses clients.
Idées marketing
Les départements créatifs imaginent aujourd’hui toutes sortes d’idées marketing originales. Coca-Cola va faire appel à Zora dans le cadre d’un concours avec codes QR sur les canettes de sodas que l’on pourra faire scanner par le robot. Il est déjà possible de programmer un robot comme Pepper depuis chez soi afin de lui faire lire un poème ou chanter une chanson à l’occasion de l’anniversaire de son enfant par exemple. Il suffit de remettre un code à l’heureux élu et de l’envoyer au magasin pour que le robot lui fasse la fête avec une chanson et un petit cadeau.
L’importance du rôle joué par les robots dans le secteur retail dépendra néanmoins de nombreux facteurs. Les points de vente et les entrepôts devront être adaptés aux tâches effectuées par les robots. Les gens devront apprendre à accepter d’avoir un robot pour employé ou collègue. Tout un programme…