La question n’était pas tant de savoir si Delhaize allait mettre fin à sa formule Red Market, mais plutôt quand ? Malgré des résultats déficitaires persistants, le bilan final n’est pas négatif : le laboratoire a bien rempli son rôle.
Une formule rafraîchissante
Ce que beaucoup avaient prédit depuis longtemps, est un fait aujourd’hui : Le CEO de Delhaize, Denis Knoops, pourtant le père spirituel de Red Market, a décidé d’abandonner la formule. Etait-ce avec regret ?
En tout cas il serait réducteur de considérer le projet Red Market comme un échec. Delhaize a toujours souligné qu’il était question d’un ‘laboratoire’. Lors de son lancement en 2009 il s’agissait d’une formule réellement rafraîchissante. L’enseigne discount s’est inspirée de Colruyt, Lidl ou encore de la formule low cost américaine Bottom Dollar (qui entretemps a été vendue à Aldi par Delhaize) et a introduit ou perfectionné d’intéressants concepts : le self scanning intégral, la file d’attente unique aux caisses, les meubles de réfrigération fermés, le shelf ready parckaging, l’offre prédominante de labels privés, les produits locaux, les ouvertures dominicales … Autant d’éléments qui aujourd’hui paraissent évidents, mais qui à l’époque étaient nouveaux.
Maîtrise des coûts
Des courses bon marché et rapides, telle était la promesse de Red Market. La chaîne garantissait les prix les plus bas dans la région. En 2009 Delhaize souffrait (encore davantage qu’aujourd’hui) d’une image prix défavorable. Chez Red Market, l’enseigne au lion a pu tester les avantages et les inconvénients d’un positionnement ‘everyday low price’ et d’une fixation de prix locale. L’ouverture du premier magasin Red Market à Gembloux a immédiatement déclenché une guerre des prix locale. En outre, dans l’analyse annuelle des prix de Test-Achats la formule a toujours talonné Colruyt et Albert Heijn, et ce encore jusqu’au mois dernier.
Pour réduire les coûts la formule proposait un assortiment relativement réduit (large, mais peu profond), en grande partie limité aux produits sous labels privés à prix serrés. L’aménagement fonctionnel du magasin, avec des produits présentés sur palettes, a également contribué à la maîtrise des coûts, tout comme les mesures d’économie d’énergie, notamment l’utilisation de meubles de réfrigération fermés et la récupération de chaleur. En optant pour le self-scanning l’enseigne a pu aussi réduire les coûts de personnel.
Aujourd’hui dans la plupart des supermarchés le self-scanning est devenu monnaie courante. D’autres innovations ont également été introduites chez Delhaize après avoir été testées chez Red Market. Mais pas toute. La file d’attente unique aux caisses, par exemple, a été testée quelque temps plus tard chez Colruyt et Carrefour (et déployée dans différents hypermarchés chez ce dernier), alors que Delhaize ne semble pas vouloir adopter ce système.
Focus sur Delhaize
Ces dernières années Delhaize n’a guère investi en vue de renouveler la formule Red Market. Le laboratoire semblait avoir accompli sa mission : effectivement, le concept a aidé Delhaize à devenir plus efficace et plus combatif. L’abandon de la formule n’est autre que la chronique d’une mort annoncée. D’autant plus que dans le contexte de la fusion entre Delhaize et Ahold, l’idée de maintenir une formule supplémentaire comptant à peine treize magasins semble peu judicieuse. Investir dans la croissance de la chaîne aurait nécessité un gros budget, sans garantie de retour sur investissement, car malgré le succès de Red Market, l’enseigne discount n’a jamais été rentable.
Aujourd’hui Delhaize se doit d’utiliser toutes ses ressources pour mener à bien la synergie promise avec Albert Heijn, tant au-devant de la scène que dans les coulisses. Désormais le focus interne se situe entièrement sur le développement des formules Delhaize. Avec l’ajout de quelques éléments à succès des magasins Albert Heijn, les formules Delhaize pourraient devenir une sorte de concept Delhaize 3.0 alliant expérience client et assortiment supérieur ét promotions et prix compétitifs. Ou tel devrait être l’objectif, n’est-ce pas ? Oui, les attentes sont élevées …