Les débuts de Delhaize dans la livraison à domicile de courses pourraient bien déclencher une véritable lutte concurrentielle sur le marché du e-commerce alimentaire en Belgique. Dans ce domaine nos pays voisins sont déjà bien plus avancés.
Un succès inattendu
Pour ceux qui doutaient encore du potentiel de la livraison de courses à domicile dans notre pays, ils auront sans aucun doute changé d’avis depuis le weekend dernier. Le lancement du service de livraison de delhaize.be a connu un succès inattendu, ce qui d’emblée a occasionné des délais d’attente d’une semaine.
Delhaize dit mettre tout en œuvre afin d’ajuster la logistique et augmenter la capacité, mais se montre néanmoins prudent : « Nous ne pouvons pas garantir à court terme qu’une commande passée en soirée pourra être livrée à domicile dès le lendemain. D’ailleurs la plupart des clients n’en sont pas demandeurs. » Etrange tout de même ? Mais c’est qui est plus étonnant encore, c’est que les concurrents pour l’instant ne créent pas leur propre service de livraison : Colruyt estime que les points de retrait sont plus durables, alors que Carrefour pour sa part collabore avec combo, le service de livraison de bpost.
Payer pour la commodité
Pourquoi est-ce étrange selon nous ? Parce que dans nos pays voisins – et plus loin aussi – la livraison à domicile tend à devenir la norme. Et parce que les retailers parviennent à livrer les commandes dans des délais de plus en plus courts. Tout le monde semble s’accorder à dire qu’une percée du e-commerce dans le secteur food ne pourra se faire que si la livraison à domicile devient un modèle performant.
Les points de retrait sont efficaces pour les retailers, mais pas vraiment pour le client, qui finalement doit quand même prendre sa voiture et affronter le trafic pour se rendre au magasin. Cela demande un effort. Le gain de temps de l’enlèvement dans un point de retrait comparé à une visite en magasin est relatif, même si le client doit juste faire un petit détour en rentrant du travail. Alors que pour une livraison à domicile il ne paiera que quelques euros en plus.
A en juger par le succès de delhaize.be, un coût de livraison de 9,95 euros semble un prix raisonnable pour bon nombre de consommateurs, si cela peut leur éviter le stress d’une visite au magasin. Lorsqu’il s’agit de commodité, nous payons avec le sourire. Les ‘millennials’ en particulier souhaitent gagner du temps et éviter le stress, indique une étude récente de Mintel. Il y a donc du potentiel à exploiter.
Talonné par Amazon
Les retailers dans nos pays voisins l’ont bien compris. La France par exemple a beau être le pays des drives, dans une ville comme Paris la livraison à domicile est monnaie courante. Dans les villes, où la densité démographique est importante et où les habitants ne disposent pas toujours d’une voiture, la livraison semble une démarche logique.
Aux Pays-Bas Albert Heijn et Jumbo, depuis un certain temps déjà, livrent à domicile selon le principe ‘commandé aujourd’hui, livré dès demain’. Jumbo vient même de passer à la vitesse supérieure. Toujours aux Pays-Bas il y a le nouveau phénomène Picnic : un supermarché online en pleine croissance, qui livre quotidiennement à l’aide de camionnettes frigorifiques électriques.
En Grande-Bretagne aussi (surtout à Londres) la guerre des services de livraison fait rage. Les retailers se livrent à une véritable surenchère : Tesco, Sainsbury, Marks & Spencer (en collaboration avec le service de livraison Togle) et Morrisons (avec le pure player Ocado) s’engagent à livrer les courses dans l’heure. Une compétitivité bien évidemment liée à l’arrivée au Royaume-Uni d’AmazonFresh, qui ne tardera certainement pas à s’implanter dans le reste de l’Europe, tout comme les boutons de commande Amazon Dash, déjà disponibles au Royaume-Uni, en Allemagne et en Autriche. Une simple pression sur un bouton : quoi de plus facile ?
Livraison durable
S’agissant de livraison à domicile, une critique émerge à chaque fois : toutes ces camionnettes sillonnant la ville encombrent les rues et aggravent la pollution. C’est pourquoi bon nombre de retailers testent des méthodes de livraison alternatives et plus durables.
Le supermarché online Picnic par exemple opte pour des camionnettes électriques. Albert Heijn pour sa part teste la livraison à vélo, endéans l’heure. A Paris Carrefour fait de même depuis l’arrivée d’Amazon Prime Now. Et chez nous l’entreprise de distribution urbaine Bubble Post s’attaque au dernier kilomètre avec des triporteurs, des fourgonnettes électriques et depuis peu avec un nouvel engin, baptisé Sint, un véhicule électrique capable de transporter 400 kg de marchandises. Bubble Post collabore déjà avec le grossiste du secteur horeca Metro pour l’approvisionnement de restaurants à Anvers. Nous sommes loin d’avoir tout vu en matière de solutions durables.
Conclusion ? La livraison des courses à domicile est une option attrayante pour le consommateur, à condition que la logistique soit capable d’atteindre le rythme ‘aujourd’hui pour demain’. L’exemple de Delhaize ne devrait pas tarder à faire des émules, car comment ne pas suivre le mouvement. La croissance du e-commerce dans le secteur food s’en trouvera stimulée. Prêts à vous lancer ?