Malgré des conditions de marché difficiles, le sens d’urgence était palpable en 2024 : de nombreux retailers ont accéléré et ont opté pour l’expansion, des nouveaux venus aux acteurs bien établis. Mais souvent, ils l’ont fait de manière aussi économe que possible…
De l’expansion « allégée »
Dans le domaine alimentaire, les « cinnamon rolls » et les poké bowls restent tendance – une aubaine pour Hawaiian Poké Bowl et Have a Roll. Les chaînes anversoises se sont principalement concentrées sur une expansion aux Pays-Bas en 2024, tout comme les sœurs de Les Soeurs. Pas par le biais de propres magasins, mais via le commerce de gros. Alain Afflelou a également misé sur des points de vente existants : le groupe français voulait ouvrir davantage de centres auditifs en Belgique, de préférence chez des opticiens locaux. Par contre, la marque de jeans Chasin’ a opté pour des corners en magasins.
C’était un fil conducteur de l’année : les retailers ont opté pour une croissance à faible coût, de préférence via la franchise et le commerce de gros, soutenus par des magasins éphémères là où c’était nécessaire. Le roi des pop-ups était sans aucun doute Wondr : la marque de soins écologiques a transformé le « bootstrapping » en marketing viral, en utilisant même des meubles Ikea empruntés.
Même C&A voit petit : l’enseigne de mode a conçu une nouvelle formule urbaine de petite taille. CRG a opté pour de plus grands formats, mais en répartissant soigneusement les coûts : les filiales Mayerline, JBC et CKS partagent déjà un toit à deux emplacements. Le détaillant de mode néerlandais Norah prévoit d’ouvrir 25 magasins en Flandre, mais choisit délibérément des emplacements « plus économiques » : de petites villes commerciales et des centres commerciaux couverts.
Orchestra-Prémaman et Le Pain Quotidien visent tous deux une croissance via la franchise. Le premier veut retenter sa chance en Flandre, tandis que la chaîne de boulangeries vise des destinations plus exotiques, de l’Inde au Pérou. Les frites de Sergio Herman suivent la voie dorée intermédiaire : des franchises dans toutes les capitales européennes d’ici 2030.
Les rois du discount poursuivent leur percée
Jysk a ouvert huit magasins en Belgique en trois mois seulement, et ce n’était pas encore la fin. Les enseignes discount continuent de défier les lois du changement en faisant toujours plus de la même chose : plus de magasins, plus de pays et, par miracle, plus de clients. Avec succès, car chez Action, un nouvel emplacement est amorti en moins d’un an. D’ici 2026, l’enseigne prévoit d’ouvrir encore 1 300 à 1 400 nouveaux magasins en Europe. Elle n’a pas le choix si elle veut rester en tête de la concurrence.
Tedi veut en effet « accélérer » et voit un potentiel de 10 000 magasins en Europe. Et bien sûr, les Chinois veulent eux aussi leur part du gâteau : Miniso – parfois appelé l’Action chinois – souhaite obtenir la moitié de son chiffre d’affaires à l’échelle internationale dans quelques années. Cependant, le groupe faillitaire Mirage Retail Group était jusqu’à présent titulaire de la licence aux Pays-Bas, y rendant l’avenir plutôt incertain. Wibra est en tout cas inarrêtable, que ce soit en France ou en Belgique.
MediaMarkt a fait de grands pas dans tout le pays avec cinq ouvertures de magasins, tandis qu’en Flandre-Occidentale, ils ont accueillis les Anversois de Peeters-Govers. Albert Heijn a appuyé sur l’accélérateur en 2024, sous la pression de Jumbo, Okay et Lidl. Okay Compact est devenu Okay City et vise maintenant 100 magasins urbains en huit ans. Bien que le premier Jumbo Foodmarkt belge ait été sa plus grande réalisation de cette année, le « danger jaune » affirme croître plus vite que le marché.
Santé et animaux sont également restés des marchés en forte croissance. Après une expansion en Italie, Medi-Market s’implante en Espagne, tandis que WelloPet a ouvert son cinquième et plus grand centre de santé pour animaux de compagnie. Goe Beestig a poursuivi son développement avec un deuxième magasin, tandis que Maxi Zoo a ajouté cinquante magasins aux Pays-Bas.
La barrière linguistique franchie
Les enseignes établis ont lorgné avidement au-delà de la barrière linguistique. Dovy fabrique dorénavant des cuisines comme si elles étaient destinées à la Wallonie, tandis que Yess!, le discounter fondé par Bart Coeman, s’est installé à Ciney. Dille & Kamille a franchi la barrière linguistique pour la troisième fois, et la boucherie de luxe flamande Dierendonck pour la première fois. Inversement, Kiabi espère attirer principalement des entrepreneurs flamands avec le déploiement d’un modèle de franchise. Même Extra Shop regarde vers la Flandre pour son expansion. Showroomprivé utilise la Belgique comme marché test avant de s’étendre en Europe.
Sauf la Flandre, Eggo recherche la croissance principalement en Espagne. Tout comme Ixina, qui explique pourquoi : le marché immobilier espagnol est en plein essor, mais il y a peu de formules de cuisines disponibles. ZEB a franchi les frontières pour la première fois avec l’ouverture de ses premiers magasins en France. Pas à ses premien France, mais ambitieux : Amazon a promis d’y investir 1,2 milliard d’euros, principalement dans l’IA et la technologie.
Les Néerlandais qui viennent en Belgique, nous y sommes depuis longtemps habitués. Holland & Barrett a ouvert de nouveaux magasins aux Pays-Bas comme sur le marché belge. Rituals a brillé d’ambition : le PDG Raymond Cloosterman voulait ouvrir cinq magasins par semaine en 2024, soit 250 magasins supplémentaires. Nous entendrons ce qu’il en est advenu l’année prochaine. Mr Marvis nourrissait également des ambitions d’expansion, initialement en Belgique et aux Pays-Bas.
Le mouvement inverse remarquable a été celui de la chaîne belge de produits capillaires Hairdis et du classique des accessoires Veritas. Maintenant que l’acquisition est finalisée, Veritas espère s’étendre aux Pays-Bas via la franchise, avec une ambition d’environ quatre-vingts magasins. Ensuite, la chaîne rêve déjà de l’Allemagne et de la Scandinavie.
Les débutants de 2024
En 2024, les Belges ont fait connaissance avec Monoprix. Après le lancement du supermarché français à Waterloo, la formule de proximité du groupe est également arrivée en Belgique, avec un premier Monop’ dans la gare rénovée de Mons. Depuis la France, la marque de mode Camaïeu a également fait son retour dans les rues commerçantes sous le nom de « be camaïeu ». D’autres nouveaux venus dans les rues commerçantes incluent Upway (vélos reconditionnés) et Marie-Stella-Maris (produits de soin premium néerlandais).
Cependant, il n’y a pas eu beaucoup de véritables nouveaux venus cette année. Ce fut surtout une période de rachats après des faillites et de nouveaux départs. Ainsi, l’enseigne Circle K est apparue aux Pays-Bas, après le rachat des stations-service TotalEnergies par Couche-Tard. Dix anciens sites de GrandOptical ont été relancés sous le nom de Opsin Optics, tandis que Lab9 est désormais le seul revendeur Apple Premium en Belgique.
Racheter ou liquider
Juste à temps pour les fêtes, Colruyt Group a lancé le site de vente de boissons Boir, mais le groupe de supermarchés s’est surtout fait entendre cette année sur le marché des acquisitions. Colruyt Group a acheté deux grossistes, Délidis et Valfrais, une participation dans la chaîne de restauration Bon, et les magasins à repas de Delitraiteur. Ils ont cependant vendu Dreambaby à Supra Bazar, tandis que ToyChamp, après Dreamland, a fait une nouvelle acquisition majeure avec Intertoys.
Les acquisitions les plus remarquables de 2024 ont toutefois eu lieu dans le domaine des grands magasins. Après la chute du groupe Signa, le groupe thaïlandais Central a racheté KaDeWe et Selfridges, bien qu’il doive partager ce dernier avec le gouvernement saoudien. Inno a été sauvé par un duo scandinave surprenant : le « Viking-raider » Jón Ásgeir Jóhannesson et l’entrepreneur suédois Ayad Al-Saffar, connu pour sa Rolls-Royce ornée de roses. Ce dernier a même abandonné Casa pour Inno.
Il était également remarquable de voir à quel point Pieter Zwart était prêt à se sacrifier pour la croissance. Le fondateur de Coolblue a vendu 7,5 % de ses actions à HAL, co-propriétaire, pour accélérer l’expansion en Allemagne, « le pays à la croissance la plus rapide ». « Jetzt geht’s los ? » En 2025, espérons-le, pas seulement pour les vendeurs d’électroménager allemands…