Un retailer qui s’enorgueillit de millions de pertes, un autre qui distribue de l’or. Et il semble acquis que des rayons vides réapparaîtront bientôt dans nos supermarchés. Mais comment le dimanche peut-il redevenir un jour sacré pour notre leader du marché ? Et pourquoi certains hommes sont-ils précoces ? Filet Pur vous le révèle en exclusivité !
Logique inébranlable
Curieux jeu de chaises musicales cette semaine dans le monde merveilleux des alliances de la grande distribution. Everest, l’association de Markus Mosa, patron d’Edeka, et de son bras droit, l’autoproclamé Robin des Bois du XXIe siècle Gianluigi Ferrari, a d’abord mis Super U à la porte pour annoncer deux jours plus tard qu’ils avaient attrapé un autre gros poisson : Aura, la nouvelle alliance entre Intermarché, Auchan et Casino (même si ce dernier ne tient techniquement qu’à un fil).
C’était évidemment téléphoné. Tout l’enjeu, pour Everest, d’être le plus grand : c’est en effet à ce niveau que se joue la rivalité avec Eurelec, l’association d’E.Leclerc, Ahold Delhaize et Rewe. Les deux alliances partagent le même objectif : supprimer les contraintes territoriales en matière d’approvisionnement qui sont à l’origine d’importantes différences de prix sur un marché unique plus divisé que jamais. Reste à savoir si la différence de taille entre U et Aura est vraiment aussi décisive, car on entend beaucoup que cette Coopérative ne serait qu’une bande de mous qui n’ont pas toujours suivi la logique de boycott de Ferrari. On ne peut pas en dire autant des Mousquetaires. Les fabricants de marques peuvent se faire du souci.
Or gratuit
Est également membre d’Everest : Picnic, le supermarché en ligne néerlandais dans lequel Edeka détient une participation. Mais de ce côté, les avantages de ces achats conjoints en termes de synergie ne sont pas encore visibles. Oui, Michiel Muller s’est bien vanté il y a quelque temps d’avoir réalisé ses premiers bénéfices aux Pays-Bas. Mais c’était juste pendant quelques semaines. Sur l’ensemble de l’année, la perte atteint quand même 78 millions d’euros. Pas tellement surprenant quand l’ensemble de votre modèle d’entreprise repose sur le fait de jeter de l’argent par les fenêtres, mais quand même. Et les coûts vont encore augmenter cette année. Il ne faut donc s’attendre à aucun infléchissement de la tendance pour l’instant.
Michiel Muller devrait peut-être demander conseil à Carrefour, qui utilise déjà l’intelligence artificielle pour optimiser l’assortiment, le marketing et la tarification. Bientôt, vous paierez des prix différents au supermarché en fonction de votre profil de client. C’est encore autre chose que les offres semi-personnalisées dans l’application, non ? Mais l’IA rapporte déjà tellement d’argent que Carrefour peut se permettre de distribuer des lingots d’or dans notre pays. Fort.
Le jour du Seigneur
Pour la petite histoire : au Salon Carrefour d’il y a quelques semaines, l’entreprise a fièrement partagé sur un écran les résultats du premier mois ScanMania, qui a eu lieu l’année dernière. Ce qui a fait souffler un léger vent de panique chez les attachés de presse qui venaient d’arriver au stand avec un groupe de journalistes : la transparence, c’est bien, mais là, ce n’était vraiment pas le but. Bon, j’ai donc promis de ne pas publier les chiffres. Disons simplement qu’à Zaventem, ils n’ont pas eu besoin d’intelligence artificielle pour décider de donner une suite à cette action.
À noter : alors que de nombreux food-retailers n’ont cessé de se féliciter ces dernières semaines, tout est resté curieusement calme à Halle. Du moins jusqu’à mercredi soir : lors de son assemblée générale, Colruyt Group a dû admettre bien à contrecœur que ses parts de marché étaient bel et bien sous pression avec la concurrence accrue – et très déloyale – de Delhaize et d’autres formules de franchise qui n’ont aucun respect pour le jour du Seigneur. Le pape devait l’entendre ! C’est d’ailleurs un constat remarquable : seules les enseignes qui ouvrent également le dimanche semblent encore gagner des parts de marché. Et ce n’est pas cette vingtaine d’Okay Compact qui vont réellement changer la donne.
Pas de garantie du meilleur prix
Pour le CEO Stefan Goethaert, il n’en fallait pas plus pour remettre sur la table ces fameuses commissions paritaires, mais vous pouvez déjà entendre la réaction des concurrents jusqu’ici : change de disque, celui-ci est griffé. Je pense d’ailleurs qu’ils ne se font pas beaucoup d’illusions non plus à la Chaussée d’Enghien. Il a donc opté pour l’offensive : Colruyt intensifie sa chasse au citadin en prenant une participation dans une chaîne qui se dit « gourmet ».
Alors oui, gourmet ? C’est juste un bar à sandwichs et à salades. Mais la bière Cara se dit également Premium, n’est-ce pas ? Le BON anversois se trouve dans l’INNO, à côté des magnifiques bureaux de RetailDetail, et il nous arrive donc d’y déjeuner – au début du mois en tout cas, car la soupe est deux fois moins copieuse qu’au Délifrance pour un montant à peine inférieur. Pas de garantie du meilleur prix, donc, mais pour les marges, c’est mieux.
Trop tard
Hourra : la banane est sauvée ! Ou presque. Chiquita et une litanie de partenaires scientifiques ont réussi à cultiver la première banane comestible qui résiste aux maladies fongiques mortelles qui menacent la survie du plus populaire de tous les fruits. Un vrai soulagement pour les supermarchés, car le fruit jaune est une des meilleures ventes, en particulier parmi les familles avec enfants – un groupe cible fondamental. Sans compter qu’il y a parfois un petit extra dans la caisse : dans 11 Aldi de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, le produit Super Malin de cette semaine était une grosse cargaison de cocaïne à des prix défiant toute concurrence. Merci à la sécurité légendaire du port d’Anvers.
Enfin, encore ceci : être précoce, c’est un problème délicat pour beaucoup d’hommes – difficile à aborder aussi. Il faut faire preuve de compréhension, mais sans exagérer non plus. Et surtout si cela se reproduit à nouveau chez Lidl : le grand Saint a en effet fait son apparition dans la brochure avec plusieurs semaines d’avance. Alors que, selon les accords, ce n’est autorisé qu’à partir du 1er novembre, histoire d’éviter les traumatismes infantiles. « Désolé, ce n’était pas voulu », s’excuse encore le discounter, mais oui, il était déjà trop tard. Oups ! À la semaine prochaine !